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 L’internationalisation du renminbi : enjeux et limites des réformes institutionnelles


Adrien FAUDOT * Maître de conférences en économie, Université Grenoble Alpes, CERAG, 38000 Grenoble, France.
L’internationalisation du renminbi (RMB) a focalisé l’attention de nombreux universitaires, économistes et politologues, depuis la fin des années 2000. Les données disponibles aux chercheurs font état d’un développement de l’usage du RMB à l’échelle internationale. Cet article a un double objectif : dans un premier temps, exposer les évolutions qualitatives de la monnaie chinoise, en analysant les modifications du cadre institutionnel du RMB. Dans une seconde section, il interroge les ambitions et les limites de la stratégie de la Chine d’internationalisation de sa monnaie. À ces fins, ce travail se penche sur la littérature qui s’est largement répandue sur le sujet ces dernières années. Dans la mesure où l’émergence monétaire internationale de la Chine est un processus conflictuel à la fois au niveau national et international, générateur de tensions avec d’autres puissances, en premier lieu les États-Unis, cet article questionne à la fois la volonté et la capacité de la Chine à surmonter les obstacles à l’internationalisation de sa monnaie.

L’histoire récente de la Chine est caractérisée par un développement économique sans précédent. Sont souvent avancées sa stratégie mercantiliste et la distance qu’elle a prise avec les préconisations du consensus de Washington pour expliquer son ascension et son statut de premier exportateur mondial. Le pays a développé une production diversifiée et de plus en plus sophistiquée, justifiant des salaires de plus en plus élevés, et commençant la transformation structurelle à l’œuvre dans le pays (Felipe et al., 2013). Cela fait donc plusieurs années que la Chine a bouleversé les statistiques mondiales en termes de croissance, de production et de commerce. En revanche, sa situation est différente sur le plan financier et monétaire. La monnaie chinoise, le renminbi (RMB), est longtemps restée absente des données internationales, car elle n’avait aucun rôle mondial. En témoigne l’étude de Cohen et Benney (2014) dont les données s’arrêtent à 2010 et qui montre que les opérations monétaires internationales sont libellées essentiellement en dollars et, dans une moindre mesure, en euros, le système monétaire international prenant une forme tantôt unipolaire, tantôt bipolaire selon les fonctions monétaires étudiées. Pour chacune d’entre elles, le RMB est dépassé par des monnaies de second rang, son utilisation étant anecdotique1. Cette divergence entre le poids de l’économie chinoise dans le monde et le faible recours à sa monnaie est toujours présente, mais elle se réduit. Autrement dit, le RMB s’internationalise. La dynamique de son internationalisation est indiscutable sur le plan statistique (cf. graphique 1, ainsi que PBoC, 2014) : insignifiante en 2009, la part du commerce en RMB de la Chine avec le reste du monde n’a cessé d’augmenter pour représenter en 2014 près d’un quart des échanges de la Chine.

Graphique 1 - Commerce transfrontalier de la Chine réglé en RMB (en milliards de RMB et en % du commerce international)
Note : les pourcentages désignent la part du commerce réglée en RMB sur le total des échanges de la Chine avec le reste du monde.
Source : People’s Bank of China.

Les données publiées par la Banque centrale de Chine (désormais People’s Bank of China – PBoC) sont celles du règlement du commerce chinois2. Comme le note Prasad (2014, p. 238), le règlement du commerce se fait dans des proportions plus importantes en RMB pour les importations chinoises, car le RMB est demandé par les non-résidents et c’est un moyen d’en faire sortir du territoire chinois. Ces transactions commerciales sont la principale source de dépôts de RMB dans les diverses plateformes autorisées, également dans une dynamique de croissance soutenue, comme en témoignent les données de Hong Kong (cf. graphique 2 ci-contre). Ces RMB viennent s’ajouter à ceux des résidents de Hong Kong, autorisés à se procurer en quantité limitée des dépôts en RMB. Or les titulaires de ces dépôts se trouvent en quête d’investissements et de placements, c’est pourquoi l’attraction d’une monnaie est renforcée par l’existence d’un marché de titres libellés dans la monnaie, sans quoi les détenteurs sont incités à convertir leurs dépôts dans d’autres monnaies autour desquelles de tels marchés existent. Les dim sum bonds, émis en RMB sur les places offshore, ont été autorisés en 2007 et constituent un moyen d’absorber les montants de plus en plus importants de RMB offshore (Mathur et De, 2014). Ils représentent des montants croissants (cf. graphique 3). L’émission de ces obligations par des acteurs non chinois a débuté en 2010, le premier d’entre eux étant le géant américain McDonald. En octobre 2014, le gouvernement du Royaume-Uni a émis pour 3 milliards de RMB de ces obligations, la première émission de titres souverains en dehors de la Chine.

Graphique 2 - Dépôts en RMB à Hong Kong (en milliards de RMB, 2004-2014)
Source : Hong Kong Monetary Authority.
Graphique 3 - Montant des émissions de dim sum bonds (en milliards de RMB, 2007-2014)
* Prévision de HSBC.
Source : Aite Group (2014).

Ainsi, les données disponibles laissent peu de places au doute quant à l’émergence monétaire de la Chine. Malgré une part relativement faible dans les paiements internationaux, les statistiques montrent sans équivoque que le RMB a progressé très rapidement par rapport à 20103, de sorte qu’il a dépassé des monnaies de second rang comme le dollar australien et le franc suisse (d’après les données de SWIFT – Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication), passant en décembre 2014 à la cinquième place mondiale. Cette tendance devrait être appuyée par la récente inclusion du RMB dans le panier du droit de tirage spécial (DTS), qui désigne l’actif de réserve du Fonds monétaire international (FMI) entrant en vigueur le 1er octobre 2016, renforçant ainsi la crédibilité internationale du RMB.

La Chine se distingue des autres pays désignés comme « émergents » par la littérature académique, tels que l’Inde et le Brésil, les usages de la roupie et du réal étant bien plus limités, tandis que le rouble russe a été particulièrement fragilisé en 2014. Cette divergence au sein des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) conforte les propos tenus par Jim O’Neill selon lequel aujourd’hui, les BRIC se réduiraient au seul « C »4. L’étude comparative des différentes puissances monétaires émergentes depuis Bretton Woods qualifie la Chine à part et sans prédécesseur de même nature, ce qui pose la question de savoir jusqu’où ira le RMB (Cohen, 2014). La Chine place les analystes des questions monétaires internationales dans une situation d’incertitude, notamment parce qu’elle n’est pas un allié historique des États-Unis. Elle génère un grand nombre de travaux aux conclusions diverses, parfois contradictoires.

La première partie de cet article étudie les évolutions du cadre institutionnel du RMB. La seconde partie traite de l’ambition qui anime la Chine dans le processus d’internationalisation de sa monnaie, ainsi que les limites potentielles à sa poursuite.

Évolutions du cadre institutionnel de la monnaie chinoise

Sachant la monnaie indissociable des institutions qui la créent et la véhiculent, l’étude de l’internationalisation du RMB ne peut se dispenser de présenter les évolutions qu’a connues la monnaie chinoise sur le plan institutionnel. Nous constatons trois évolutions importantes : la signature d’accords bilatéraux de swaps, l’ouverture de plateformes offshore et la réforme des systèmes de paiement en RMB. À des niveaux différents, ces changements traduisent à la fois un renforcement des connexions du RMB avec le reste du monde et un rôle accru pour les autorités monétaires chinoises, la PBoC étant largement impliquée dans les innovations institutionnelles du RMB.

La diplomatie du RMB et les accords bilatéraux de swaps

Les travaux sur l’internationalisation du RMB mettent fréquemment en évidence la signature de contrats bilatéraux de swaps entre la PBoC et les banques centrales de ses partenaires, dans plusieurs régions du monde. Ces accords représentent un pan important de la diplomatie monétaire chinoise et impliquent directement la PBoC, ce qui agit favorablement sur le sentiment, pour les acteurs, d’être en présence d’un véritable prêteur en dernier ressort (Eichengreen, 2013, p. 161). Ces contrats sont demandés par les partenaires de la Chine.

La Chine a ainsi signé un grand nombre d’accords de swaps, qui visent à assurer la fourniture de liquidités aux signataires des contrats. À la différence de la plupart des contrats de swaps signés notamment dans le cadre de l’initiative de Chiang Mai, depuis décembre 2008, ces swaps bilatéraux sont en RMB et, par conséquent, n’impliquent plus le dollar.

Le caractère bilatéral (plutôt que multilatéral) des contrats est perçu comme un moyen pour la Chine de négocier dans l’opacité, justifié par la nécessité de s’assurer la fourniture de matières premières dont elle est importatrice, et parce que de tels accords sont moins susceptibles d’engager les pays signataires dans des réformes (Jiang, 2014). Une étude empirique s’oppose à cette vision en montrant que les choix de pays sont motivés par la taille du pays signataire, l’intensité de son commerce avec la Chine et l’existence d’accords de libre-échange (Garcia-Herrero et Xia, 2013).

Graphique 4 - Montants des douze plus importants accords de swaps de la PBoC (en milliards de RMB et en % du commerce bilatéral, au 1er mars 2015)
Note : commerce bilatéral avec l’Union européenne à 28 et non la seule zone euro, pour 2013.
Source : adapté de Hatzvi et al. (2014). Le calcul du commerce bilatéral (pour 2014) a été fait via la base de données Comtrade, les montants en dollars ayant été convertis au taux de change USD/CNY en août 2015.

Les accords de swaps permettent de garantir des liquidités à des partenaires dont les rôles sont effectivement différents pour l’économie chinoise : approvisionnement en matières premières pour les uns (Australie, Canada, Brésil, Russie), renforcement de l’intégration financière pour d’autres (Hong Kong, Singapour, Royaume-Uni) ou encore de l’intégration régionale (Corée du Sud, Malaisie, Indonésie). Le graphique 4 (supra) regroupe les douze principaux accords de swaps. Le plus important d’entre eux est celui passé avec Hong Kong, qui garantit des liquidités à hauteur de 400 milliards de RMB. Les banques centrales d’Asie restent majoritaires dans la liste des signataires. Notons que ce type d’accord est beaucoup plus difficile à obtenir de la Federal Reserve (Fed) américaine, qui marginalise une partie du monde en développement en lui refusant cet accès supplémentaire à des liquidités (Prasad, 2014).

Ces contrats garantissent l’ouverture de lignes de crédit en RMB en cas de pénuries de liquidité, c’est-à-dire lorsque les marchés offshore viennent à manquer de RMB, ce qui rend ainsi nécessaire une connexion supplémentaire avec le milieu onshore. Ils ne sont utilisés qu’en dernier ressort, le contrat prévoyant une prime, c’est-à-dire un supplément de taux d’intérêt de 25 points de base par rapport à celui pratiqué sur le marché onshore (Ballantyne et al., 2013). Leur influence sur l’utilisation du RMB est donc positive, mais surtout indirecte, instaurant un rapport de confiance auprès des utilisateurs internationaux en leur fournissant une assurance.

Le développement des plateformes offshore en RMB

De manière à rendre accessible le RMB tout en souhaitant conserver les règles qui encadrent le système monétaire et financier chinois, les autorités ont démarré un processus d’ouverture de plateformes offshore où se tiennent des transactions en RMB. La première plateforme ouverte est celle de Hong Kong, dont l’autorisation date de novembre 2003 et le démarrage de février 2004. Hong Kong est une cité connue pour avoir été pendant plusieurs décennies le corridor reliant la Chine au monde occidental. Sur le plan monétaire et financier, elle occupe les mêmes fonctions. En Asie, Singapour et Taïwan sont également des plateformes de transactions en RMB de grande dimension.

La monnaie qui circule offshore reste la monnaie chinoise et donc une créance sur le système bancaire chinois. En revanche, ces plateformes permettent aux banques de se soustraire à certaines règles contraignantes sur le territoire d’émission. Ces développements offshore aboutissent à l’existence de deux taux de change, le CNY (qui s’applique au RMB du mainland) et le CNH (qui s’applique au RMB convertible disponible à Hong Kong, mais qui désigne plus largement les RMB dans l’ensemble des plateformes offshore).

Tableau - Quelques éléments à propos du fonctionnement des marchés du RMB onshore et offshore vis-à-vis du dollar américain
Source : adapté à partir de Shu et al. (2014, p. 20).

L’existence de deux taux de change traduit des réponses différentes à des chocs car, d’une part, les acteurs ne sont pas les mêmes sur les marchés onshore et offshore (cf. tableau), leurs réactions sont donc différentes et, d’autre part, les restrictions légales qui fondent la distinction onshore et offshore créent un spread qui correspond à une prime5. Si le CNH, déposé dans des banques hors du territoire chinois, échappe à la plupart des régulations du CNY, en contrepartie, il ne bénéficie pas du backstop de la PBoC. Toutefois, le CNY et le CNH s’échangent entre eux à parité. Comme l’expliquent Gagnon et Troutman (2014), les divergences entre ces deux taux de change se résorbent a posteriori par le biais du règlement du commerce chinois, du fait des arbitrages opérés par les résidents – qui choisissent finalement entre CNY et CNH – et de leur liberté effective dans les opérations courantes, à la différence des opérations financières, qui sont encore l’objet de contrôles. L’existence d’une prime, soit un CNH plus cher qu’un CNY, génère une hausse du règlement des importations en CNH par rapport aux exportations, provoquant une hausse de l’offre de RMB offshore et, par conséquent, une baisse de la prime. Une réduction des divergences entre zones onshore et offshore est également permise par l’augmentation de l’offre de titres en RMB offshore (cf. graphique 4 supra), qui harmonise les rendements des actifs financiers entre les deux zones. Comme l’expliquent Hatzvi et al. (2015, p. 288), alors qu’autrefois les rendements des dim sum bonds étaient inférieurs à ceux qu’il était raisonnable d’espérer dans le mainland (un non-résident se trouvant face à un nombre réduit de possibilités d’investissements en RMB du fait des contrôles concernant le compte de capital), cet écart s’est largement réduit avec l’ensemble des mesures progressives de libéralisation. Selon cette logique, la convergence des taux de change devrait se poursuivre dans le sillage de la libéralisation financière (Shu et al., 2014).

Les développements offshore du RMB peuvent être considérés comme une stratégie visant à améliorer la circulation et la disponibilité de la monnaie, facilitées par un cadre légal beaucoup plus permissif, même si in fine la supervision par la PBoC, via l’offre de monnaie banque centrale, est toujours effective. Une telle stratégie n’est pas sans rappeler celle qu’ont suivie les banques américaines profitant de la possibilité laissée par le droit américain d’effectuer des opérations bancaires offshore en dollars. Ces opérations, qui ont eu pour point de départ le financement du commerce international et le recyclage de ces opérations en bankers’ acceptances, ont débuté après le Federal Reserve Act de 1913, à partir duquel le dollar a démarré son internationalisation (Eichengreen et Flandreau, 2012). Elles ont contribué à fournir des dollars au reste du monde.

Par ailleurs, le gouvernement chinois approuve un nombre croissant de banques de clearing, qui permettent d’améliorer la liquidité des acteurs, en facilitant l’accès au système de paiement chinois. Auparavant, les acteurs ne se procuraient des RMB qu’au moyen de banques correspondantes (le correspondent banking) en ouvrant un compte nostro auprès d’une banque située sur le mainland. Les clearing banks officielles constituent une amélioration en ce qu’elles officialisent et sécurisent les opérations en RMB avec le reste du monde, tout en améliorant également leur coordination et leur rapidité (Hatzvi et al., 2014). À Hong Kong, la Bank of China (Hong Kong) Limited est la banque officiellement en charge du clearing. Sa légitimité pour les opérations interbancaires repose sur une connexion directe au guichet de la PBoC. C’est par son intermédiaire que les agents à Hong Kong accèdent à un service de paiement en RMB, tout en utilisant l’infrastructure locale (SWIFT, 2012). D’autres pays d’Asie accueillent des clearing banks  : celles-ci se trouvent à Macao (depuis 2004), Taïwan (2012), Singapour (2013), Séoul, Kuala Lumpur et Bangkok (2014). Sept banques de ce type ont été autorisées en dehors de l’Asie en 2014. Elles se situent à Sydney, à Toronto, à Londres, à Frankfort, à Paris, au Luxembourg et à Doha. Zurich s’est ajoutée à cette liste en  2015, ainsi que Johannesburg et Santiago du Chili, qui sont les premières banques de clearing en RMB en Afrique et en Amérique du Sud. En permettant à la PBoC d’intervenir indirectement dans les transactions en RMB sur les marchés offshore, ces banques jouent un rôle essentiel pour la fourniture d’un moyen de règlement interbancaire aux banques internationales qui opèrent en RMB. Ce rôle devrait être progressivement atténué par la réforme des systèmes de paiement en RMB.

L’amélioration des systèmes de paiement en RMB

La troisième évolution institutionnelle que nous souhaitons évoquer concerne les infrastructures de paiements en RMB, indispensables pour faciliter sa circulation dans les échanges interbancaires. L’internationalisation d’une monnaie s’appuie aussi sur l’efficacité de son système de paiement. L’architecture des paiements internationaux repose aujourd’hui largement sur des institutions américaines reconnues pour leur capacité à fournir en liquidités le reste du monde, et à faire circuler le dollar.

Les institutions américaines en question sont Fedwire et CHIPS (Clearing House Interbank Payments System) auxquelles sont connectés des « participants », c’est-à-dire des banques internationales américaines ou des banques étrangères disposant d’une branche américaine. La première est un service fourni par la Fed connectant les différentes reserve banks du pays entre elles, gérant les transferts domestiques des banques américaines connectées à ce réseau. Fedwire étant un système real time gross settlement (RTGS), les transferts au sein du réseau sont opérés en temps réel. CHIPS est une chambre de compensation privée, connectée à la Federal Reserve Bank of New York, qui gère les transferts internationaux selon une méthode particulière : les banques participantes fournissent un prefunding de départ en monnaie banque centrale ; les opérations de paiement sont, dans la mesure du possible, réalisées en temps réel, puis à la fin de la journée, les paiements mis en attente sont réglés à chaque membre après être passés dans une chambre de compensation suivant les principes d’un multilateral netting system. Une infrastructure comme CHIPS est primordiale pour les paiements internationaux en dollars, car elle offre un cadre sécurisé particulièrement efficient pour opérer les paiements interbancaires de manière optimale (c’est-à-dire en optimisant à la fois les liquidités mobilisées et le temps nécessaire pour la transaction), et ce, en monnaie banque centrale.

La Chine a longtemps été dépourvue d’institutions similaires. Son système de paiement, jusqu’en octobre 2015, était le système China National Advanced Payment System (CNAPS) qui souffrait de nombreuses carences : le langage des messages financiers (en chinois, ce qui posait problème pour les opérations internationales), des messages ne répondant pas aux standards de SWIFT6, le caractère manuel de certaines opérations (qui induisait des erreurs « humaines »), les horaires pendant lesquels le système était ouvert (trop restreints, ce qui empêchait la réalisation de transactions avec certains acteurs ouverts à d’autres fuseaux horaires).

Toutefois, un grand projet de réformes des systèmes de paiement a été développé, bien qu’à notre connaissance, la littérature académique n’y fasse pas référence7. Il vise à aligner les structures en charge des paiements et des règlements en RMB sur les standards internationaux les plus performants pour les paiements internationaux. L’annonce la plus significative réside dans le design que prendrait l’architecture des paiements en RMB. Les différents rapports disponibles – publiés par des banques internationales – font savoir que cette architecture prendrait la même forme que celle dont bénéficie actuellement le dollar, avec CNAPS conservant son rôle de plateforme RTGS pour les règlements domestiques – équivalent de Fedwire aux États-Unis – combiné à CIPS (China International Payment System), une plateforme de type hybride (ou RTFS) – équivalent de CHIPS – dédiée aux paiements internationaux.

Du fait de la complexité des techniques nécessaires à l’élaboration d’une structure similaire à celle des États-Unis, la Chine a pris du retard dans cette construction, mais le système a été lancé le 8 octobre 2015. Il comprend dix-neuf banques participant directement à CIPS, parmi lesquelles onze banques chinoises (les huit restantes sont des banques étrangères disposant d’une branche en Chine)8. En ouvrant des sièges de membres directs à des banques étrangères, CIPS ne s’adresse pas uniquement aux acteurs chinois. Il est clair que ce projet en lui-même indique une volonté de la part des autorités chinoises de créer le cadre dans lequel le RMB pourra s’internationaliser9. CIPS aura pour base Shanghai, qui bénéficie depuis l’été 2013 du statut de ville-pilote dans le cadre du programme de libéralisation Shanghai Pilot Free Trade Zone (SPFTZ), amenant une baisse effective du contrôle des capitaux (Whalley, 2015). La cité a ouvert une voie vers la convertibilité du RMB sur le territoire chinois et est logiquement désignée pour centraliser le système des paiements internationaux en RMB.

Ces transformations qualitatives sont révélatrices de l’émergence monétaire de la Chine et de la démarche des autorités monétaires chinoises de s’impliquer dans le processus d’internationalisation du RMB. Il convient alors de déterminer si le RMB est destiné à se substituer au dollar ou bien s’il se cantonnera à une existence en tant que monnaie de second rang dans la pyramide des monnaies10.

Ambitions chinoises et limites potentielles à l’internationalisation du RMB

Deux interrogations doivent être soulevées dans le traitement de l’internationalisation de la monnaie chinoise. D’abord, quelles sont les ambitions des autorités chinoises pour le RMB ? Ensuite, au-delà de leurs volontés, quelles sont leurs capacités ? Cette dernière question invite à étudier les obstacles posés à la monnaie chinoise.

Les ambitions des autorités chinoises

Aucune monnaie ne peut s’internationaliser sans l’aval – et même l’appui – des autorités du pays émetteur (Kirshner, 2014, pp. 215-216). Cet argument est souvent avancé pour expliquer les ralentissements de l’internationalisation du deutsche mark, du yen, ou de l’euro, qui n’ont pas bénéficié du support des autorités monétaires et politiques compétentes pour encourager leur internationalisation. Sans volonté d’expansion monétaire internationale, l’internationalisation du RMB sera certainement limitée.

Bien que l’internationalisation d’une monnaie dépende avant tout de son utilisation – et donc de son acceptation – par des agents privés dans le reste du monde, le processus semble conditionné par la levée progressive de restrictions liées à son usage (He, 2012). La monnaie s’internationalise par le biais d’acteurs privés qui créditent, prêtent, investissent, facturent et règlent leurs transactions. En cela c’est un processus « endogène », évoluant selon le contexte juridique, qui régule les opérations sur les marchés. L’État a la possibilité d’encadrer les pratiques monétaires des acteurs au travers de contrôles plus ou moins stricts dans l’espace sur lequel il est souverain, protégeant son système de la présence d’acteurs du reste du monde, contribuant à définir l’espace de souveraineté monétaire. Outre son soutien sur le plan diplomatique et institutionnel, le gouvernement chinois s’est doté d’une réglementation protégeant au niveau domestique le RMB, mais se montrant également de plus en plus favorable à son internationalisation.

Plusieurs éléments peuvent laisser penser que la Chine n’a pas de stratégie visant à se substituer au dollar. Tout d’abord, certains discours d’officiels chinois dénoncent non seulement la domination du dollar, mais aussi la construction institutionnelle qui la rend possible. En cela, la Chine porte un projet de refonte du système monétaire international qui remet en question la possibilité laissée à une monnaie d’être hégémonique11. Ainsi, l’idée répandue selon laquelle la Chine développerait une stratégie expansionniste de manière à faire du RMB un hégémon monétaire dans une logique de « guerre des monnaies » pourrait être fantasmée. Pour Michel Aglietta, les mesures stratégiques visant à internationaliser le RMB « n’ont pas pour objectif de faire du RMB la nouvelle devise incontournable à la place du dollar, mais plutôt de bâtir un consensus visant à abolir l’hégémonie quelle que soit sa forme » (Aglietta, 2011, p. 84). Le projet chinois avancé par Zhou (2009) est un projet qui vise à remettre en question le monopole, l’hégémonie du dollar, en appelant à un nouveau Bretton Woods12. Dans cette optique, l’internationalisation du RMB n’est qu’un seuil qui vise, au travers d’un rapport de force nouveau et d’une plus grande autonomie vis-à-vis du dollar américain, à faciliter la création d’un ordre monétaire multilatéral non plus basé sur l’hégémonie américaine, mais assurant à l’économie mondiale une liquidité déconnectée des aléas des cycles de l’économie américaine.

Les autorités chinoises œuvrent pourtant activement au développement du RMB. Depuis la réaffirmation en 2009 de sa volonté de modifier le système monétaire international, la Chine a envisagé plusieurs stratégies pour contourner le conservatisme des institutions internationales, telles que les partenariats bilatéraux, les contrats de swaps et le développement de plateformes d'« avant-garde » pour le RMB offshore, que l’on a abordés plus haut. Ces stratégies ont permis à la Chine d’acquérir une autonomie croissante sur le plan monétaire, lui assurant une plus grande souveraineté. La seconde manifestation est l’ouverture des choix possibles aux acteurs internationaux, notamment en termes de monnaies de réserve (Chin, 2014). En se trouvant à l’origine de ces nouvelles options concurrentes au dollar, la Chine manifeste sa capacité à modifier le cadre du système monétaire international et, en cela, elle vient se confronter au pouvoir du dollar.

La stratégie de contournement par la Chine des institutions de Bretton Woods telles que le FMI a été mise en œuvre parallèlement à une pression continue pour tenter d’y augmenter son influence. L’inclusion du RMB dans le panier du DTS, à hauteur de 10,92 % du panier, en est le résultat. Elle a nécessité l’accord des États-Unis, qui avaient la possibilité d’user de leur droit de veto (du fait de leur 16,5 % de part au FMI). L’inclusion du RMB, désormais considéré comme « librement utilisable » (FMI, 2015), engage la Chine vers une libéralisation financière, qui apparaît comme une garantie de normalisation de l’économie chinoise offerte aux autres puissances. La convertibilité du RMB devrait donc s’accroître à l’avenir, conformément à ce que souhaitent les puissances occidentales. Toutefois, cela correspond aussi de plus en plus au souhait de Pékin, qui réalise que les restrictions financières s’adressant aux acteurs privés chinois ont drainé l’épargne domestique vers une bulle financière et immobilière dont l’explosion cause depuis plusieurs mois des dégâts considérables. La convertibilité totale du RMB d’ici à 2020 est un objectif affiché du treizième plan quinquennal. Les changements structurels de l’économie chinoise appellent à développer plus encore les investissements à l’étranger par les entreprises et les ménages chinois (Zhang et Tan, 2015), auxquels est associée une libéralisation graduelle du compte de capital. La dimension symbolique entre également en compte : l’inclusion du RMB dans le DTS était voulue par Pékin car elle le fait entrer dans le cercle restreint des monnaies de dénomination des actifs de réserve (Coudert et Lez, 2015). Un impact favorable sur l’internationalisation du RMB, bien que limité, est attendu de cette réforme du DTS, puisque les titres de dette chinoise libellée en RMB vont à cette occasion être demandés, notamment par des banques centrales du reste du monde. Le bon du Trésor chinois à trois mois sera par ailleurs intégré en octobre 2016 dans le calcul du taux d’intérêt du DTS. L’annonce de l’inclusion du RMB dans le panier du DTS s’apparente donc à une victoire de la Chine dans sa tentative d’influencer les institutions héritées de Bretton Woods.

Déterminer précisément si la Chine se situe dans une logique hégémonique ou bien si elle ne recherche qu’une autonomie plus grande vis-à-vis du dollar semble être une tâche ardue. Cependant, le processus dans lequel elle s’engage de manière assumée, en créant a minima un cadre moins dépendant du dollar, est lui-même par essence conflictuel.

Les capacités de la Chine à surmonter les obstacles à l’internationalisation en question

Une fois traitée la question des ambitions de la Chine, celle de ses capacités se pose. La Chine est vue soit comme un pays certes émergent, mais bien loin de présenter les capacités de rattraper un jour les États-Unis et le dollar, soit comme une nation capable d’assumer un rôle au sein d’un système monétaire polycentrique, soit enfin, pour les plus optimistes, comme un pays qui devrait parvenir, à terme, à rattraper, mais également détrôner le dollar. Dans la multitude des travaux sur l’internationalisation du RMB, les auteurs divergent essentiellement à propos de l’importance accordée aux différents facteurs de blocage du processus d’internationalisation.

Le premier obstacle est d’ordre macroéconomique. Un essoufflement de l’internationalisation du RMB pourrait provenir de l’incapacité de l’économie chinoise à servir de base à cette internationalisation. Si la Chine devait traverser d’importantes difficultés macroéconomiques, la crédibilité de sa monnaie pourrait être remise en question en même temps que le rythme de croissance du pays. La demande offshore de RMB est en effet poussée par les anticipations de croissance de l’économie chinoise (Gagnon et Troutman, 2014). Or le ralentissement de l’économie chinoise semble bien se confirmer au fil des mois, reflété notamment par une inquiétante diminution des importations13 et une difficulté à effectuer la réorientation si attendue du modèle de croissance par la demande interne et non plus par les exportations, à quoi s’ajoutent les baisses successives des taux directeurs de la PBoC visant à soutenir tant bien que mal la croissance du crédit à l’économie. Parmi les craintes les plus importantes, la bulle immobilière sur la région côtière présente une menace sur l’économie chinoise en même temps qu’elle traduit certains signes de son essoufflement (Gaulard, 2014). Le secteur productif ne permettant plus de rentabiliser le capital, celui-ci se valorise dans une bulle. En cas de déconvenue macroéconomique sur le plan domestique, la dynamique d’internationalisation du RMB, si elle devait se poursuivre, sera difficilement aussi soutenue qu’elle ne l’a été ces dernières années. Au Japon, l’éclatement de la bulle immobilière au début des années 1990 a largement pris part à l’extinction de la croissance japonaise. Le Japon est alors rentré dans une crise dont il n’est toujours pas sorti et qui a contribué à briser l’internationalisation du yen, pourtant promis à un bel avenir par la littérature de l’époque (Cohen, 2015, p. 40).

Si son problème de bulle immobilière est loin d’être résolu, la situation de la Chine est tout de même différente de celle du Japon. Celui-ci a subi dans les années 1980 le Japan bashing, qui a abouti aux accords du Plaza en 1985, et le yen a connu une réévaluation considérable (Meyer, 2011). Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Japon est un allié des États-Unis dans la région, tandis que la Chine est considérée comme un rival géopolitique mieux disposé à résister à ce qui est aujourd’hui appelé le China bashing. L’appréciation du yen, les flux de hot money et l’éclatement de la bulle immobilière au Japon ont plongé l’économie japonaise dans une crise déflationniste que la Chine n’a aucune envie d’expérimenter à son tour. Elle s’est ainsi jusqu’à présent opposée aux multiples appels des économistes occidentaux à l’ouverture du compte de capital et à la libre convertibilité du RMB, une nécessité pour préserver l’économie chinoise des flux déstabilisants de hot money (McKinnon et Schnabl, 2014). Si les contrôles de capitaux semblent donc nécessaires à la stabilité interne de l’économie chinoise, ils constituent certainement un obstacle institutionnel important à l’internationalisation du RMB. Un passage en revue de la littérature sur l’internationalisation de la monnaie laisse apparaître comme inévitable la libéralisation du compte de capital et la libre convertibilité du RMB : le système monétaire se doit de permettre aux agents de faire circuler les montants de monnaie selon leurs besoins. Les contrôles de capitaux apparaissent donc indésirables pour une expansion monétaire et constituent toujours le premier motif de réserve des économistes vis-à-vis du rôle international du RMB.

Par ailleurs, la Chine reste un « créditeur international immature » (McKinnon et Schnabl, 2014). Alors que les monnaies s’internationalisent au travers des banques, les banques chinoises sont perçues comme des structures mal gérées, notamment au niveau de leur capacité d’évaluation du risque, affichant des taux importants de prêts non performants (Ju et Lo, 2012). Elles se trouvent au centre de jeux d’influences politiques, inaptes à faire face à une libéralisation financière. La crise de 2008 n’a rien arrangé, elle aurait même anéanti les efforts d’assainissement des banques chinoises fournis durant plusieurs années : l’économie chinoise a vu sa croissance soutenue par le crédit durant la récession mondiale, mais le remboursement de ces crédits est aujourd’hui problématique (Jiang, 2014, p. 164).

Le régime de croissance de la Chine, qui repose sur une dynamique d’investissement et un progrès technologique permis par des exportations et des transferts de technologie, le tout encadré par l’État, appelle des contrôles de capitaux et l’accumulation de réserves. La volonté de maintenir une certaine autonomie de la croissance chinoise vis-à-vis des fluctuations intempestives des mouvements de capitaux internationaux a certes permis une dynamique d’investissement remarquable, mais elle n’a pu empêcher une forme d’intégration de la Chine au capitalisme américain, puisqu’elle l’a rendue dépendante à la fois du marché américain comme débouché et des bons du Trésor américain qu’elle n’a cessé d’accumuler. Le secteur des exportations de marchandises, essentiellement situé sur la côte Est, et les partisans d’une stabilité financière maximale en Chine ont en effet appuyé avec un certain succès l’accumulation de réserves14 (Steinberg, 2014).

Les contrôles des capitaux apparaissent alors moins comme un choix de développement interne qu’une nécessité pour préserver l’économie chinoise d’une déstabilisation de son système bancaire et d’une pénétration en son sein de banques étrangères. La Chine, qui a libéralisé une part importante de son économie dans la sphère de la production et des échanges, est plus réticente à mettre en application les promesses pourtant récurrentes de libéralisation du secteur bancaire et financier. Cette réticence est analysée par Goodstadt (2014) comme une volonté de conserver un dernier levier de contrôle économique par la structure étatique, levier qui en outre répond aux besoins des gouvernements locaux toujours influents, ce à quoi sont mêlés quelques restes de l’idéologie du Parti communiste chinois, méfiant vis-à-vis des libéralisations du secteur et soucieux de conserver dans son giron le secteur bancaire si central à l’économie chinoise.

Quelle analyse dégager de ces contrôles vis-à-vis de l’internationalisation du RMB ? La discussion débouche sur deux analyses. La première tient pour vraie l’hypothèse que la poursuite de l’internationalisation de la monnaie est impossible sans la libéralisation complète des flux financiers et du compte de capital. Dans ce cadre, les spécialistes, qui reconnaissent volontiers que la monnaie chinoise est d’ores et déjà demandée par les acteurs internationaux et bénéficie d’une crédibilité liée à la puissance de l’économie chinoise, s’intéressent alors au rythme d’ouverture financière de la Chine et observent avec attention les mesures de libéralisation (Kawai et Liu, 2015).

La seconde, plus minoritaire, regroupe les auteurs qui considèrent que les contrôles de capitaux ne seront pas levés – voire qu’ils ne devraient pas l’être –, mais qu’il est raisonnable de penser la poursuite de l’internationalisation du RMB via divers mécanismes. Par exemple, pour Aizenman (2015), l’internationalisation du RMB pourrait tout à fait se poursuivre dans les échanges de la Chine sans viser l’internationalisation financière du RMB qui, elle, nécessiterait d’achever la libéralisation financière du pays15. Après tout, il faut bien admettre que jusqu’à maintenant, la progression du RMB s’est produite sans une parfaite mobilité des capitaux à l’entrée et à la sortie de la Chine. Rhee et Sumulong (2013) affirment qu’il est possible d’accommoder les restrictions actuelles sur les flux financiers vers la Chine avec la poursuite de l’internationalisation du RMB dès lors qu’une infrastructure adéquate existe sur des places offshore pour permettre de contourner l’usage du dollar. L’infrastructure en question doit assurer le management des dépôts en RMB et offrir une passerelle vers un marché des titres dans la même monnaie. C’est également l’opinion de He et McCauley (2010) qui insistent sur le rôle important des plateformes offshore dans le processus d’internationalisation16. Enfin, pour Kirshner (2014, p. 237), l’internationalisation du RMB sans que soient levés les contrôles apparaît plausible tout en correspondant à un modèle de développement assumant ses divergences avec le modèle libéral prôné par les États-Unis. Cette seconde analyse laisse donc entrevoir la possibilité de la poursuite de l’internationalisation du RMB sans une libéralisation financière calquée sur le modèle occidental.

La monnaie chinoise, basée sur des institutions qui se distinguent à plusieurs égards du modèle occidental, est susceptible de rencontrer un écho considérable parmi les économies en développement. L’Asie constitue déjà une base solide pour l’internationalisation du RMB (cf. schéma ci-contre) et malgré un dollar toujours dominant, elle y progresse rapidement. La crise de 2008 est en partie responsable de ce succès : elle a provoqué une pénurie de dollars, générant d’importants problèmes de financement du commerce et démontrant la vulnérabilité de la région asiatique (BRI, 2014). Le RMB s’est renforcé en Asie, en se présentant comme une nouvelle source de liquidités.

Schéma - Parts du RMB dans les paiements avec la Chine et Hong Kong, banques centrales exclues
Source : adaptation par l’auteur de SWIFT RMB Tracker, mai 2015 (étude réalisée pour chacune des deux années sur les paiements de la période allant de janvier à avril).

Au-delà des facteurs potentiels de blocage centrés sur la Chine, le dernier élément à aborder est la question du RMB relative à la position du dollar américain. L’intérêt – pour ne pas dire l’enthousiasme – que suscite le RMB dans le milieu académique est accentué par les thèses « déclinistes » selon lesquelles se trouvent en déclin les États-Unis en général et le dollar américain en particulier. Ces thèses sont pourtant réfutées par un certain nombre d’observateurs rattachés à l’économie politique internationale et analysant le caractère toujours profondément américano-centré de l’économie internationale. Comme nous l’avons évoqué plus haut, le RMB a certes dépassé le seuil de 2 % des paiements internationaux en valeur, mais le dollar est lui à plus de 44 %. En dépit du fait que certains facteurs macroéconomiques devraient a priori amener le dollar à décliner (par exemple, du fait d’une perte de confiance liée à un déficit récurrent du compte courant), des facteurs d’ordre politique et institutionnel jouent un rôle dans son maintien en tant que monnaie-clé (Cartapanis, 2009). Reprenant les travaux et la méthodologie de Susan Strange17, les « antidéclinistes » constatent que le pouvoir structurel des États-Unis est toujours robuste et qu’à court terme, il est loin d’être menacé (Norrlof, 2014 ; Stokes, 2014). Par exemple, les États-Unis n’ont rien perdu de leur capacité à faire financer leur dette par le reste du monde (Stokes, 2014, p. 1080). Ils disposent de nombreux avantages qui favorisent leur domination dans les relations monétaires internationales, à commencer par leur budget militaire colossal (Norrlof, 2014, p. 1047). Évoquer cet élément permet de rappeler que le statut toujours hégémonique du dollar pourrait être le dernier facteur de blocage, et non des moindres, à une internationalisation plus poussée du RMB.

Conclusion

Le RMB se trouve dans une dynamique d’internationalisation, observable dans les chiffres du commerce international, qui est son principal moteur, mais aussi dans des activités bancaires et financières, grâce à une implication croissante de places offshore. L’internationalisation du RMB est portée par des institutions qui elles-mêmes sont en évolution, sous l’impulsion du gouvernement chinois, ce qui, sans être suffisant, est nécessaire à la soutenabilité de l’expansion de la monnaie chinoise. Ainsi, les accords de swaps, les développements des places offshore et les réformes du système des paiements internationaux en RMB représentent des avancées institutionnelles favorisant son internationalisation. La dynamique qui le porte est néanmoins menacée par des problèmes d’ordres macroéconomiques, institutionnels et politiques, dont on ne sait si ceux-ci pourront être résolus ou du moins contenus.

Un aspect qui peut sembler paradoxal à première vue est que le choix de la Chine de ne pas internationaliser sa monnaie sur les mêmes bases que les États-Unis pourrait bien être l’une des explications de l’expansion actuelle du RMB. Pour un certain nombre d’auteurs, la Chine ne cherche pas simplement à « tirer la couverture » vers elle. Sa démarche visant à influencer le système monétaire international prend appui sur une contestation du modèle libéral américain (Kirshner, 2014). Les errements de celui-ci, qui ont transparu avec force lors de la crise de 2008, constituent d’ailleurs un soutien à l’internationalisation du RMB. La remise en cause du modèle libéral américain est l’un des fondements idéologiques prêtés de manière générale à la stratégie de développement chinoise. Là encore, il convient de rester prudent vis-à-vis de cette vision qui est portée par la volonté de voir dans la Chine l’espoir d’une modification du système monétaire international et qui peut conduire à une forme de cécité sur la nature de l’économie chinoise. Toutefois, nous pensons que toute monnaie repose sur un système de confiance à plusieurs niveaux, méthodique, hiérarchique et éthique (Aglietta et Orléan, 2002, pp. 103-106). Ces différents niveaux conditionnent la liquidité elle-même. Le RMB reflète un ordre monétaire basé sur des principes politiques et éthiques sensiblement différents de ceux associés au dollar américain. L’émergence internationale du RMB au lendemain de la crise de 2008 tend à donner du crédit à l’approche insistant sur les relations de confiance vis-à-vis de l’ordre monétaire et fournit une explication au succès de l’internationalisation du RMB malgré la persistance de freins à sa liquidité. Les croyances dans les valeurs incarnées par la Chine et sa monnaie – croyances fondées ou non – pourraient avoir ainsi pour résultat de favoriser le développement du RMB.

Enfin, l’internationalisation du RMB ne s’écrit pas sur une page blanche, mais dans un monde où d’autres monnaies circulent déjà. L’étude de l’émergence du RMB ne peut se dispenser de tenir compte des pratiques monétaires préexistantes – caractérisées par un usage dominant du dollar dans les relations monétaires du continent asiatique dans son ensemble – et donc de prendre en considération l’attitude et la stratégie des principaux intéressés, à savoir les États-Unis, aux yeux de qui une remise en cause à grande échelle du dollar par le RMB est une menace susceptible d’engendrer des bouleversements majeurs, économiques, mais aussi politiques.


Notes

1 « Le yuan est si loin derrière dans la course, qu’il est à peine observable. » (Cohen et Benney, 2014, p. 1038).
2 Par exemple, au deuxième trimestre de 2014, sur les 3 270 milliards de RMB correspondant au commerce international dans la monnaie chinoise, 1 230 milliards de RMB ont servi aux exportations et 2 040 milliards de RMB aux importations, ce qui confirme la tendance à la sortie de RMB de la Chine par le commerce international.
3 En janvier 2012, la part du RMB ne représentait que 0,25 % de la valeur des paiements internationaux, mais s’élevait à 2,17 % en décembre 2014 (contre 44,64 % pour le dollar américain).
4 « Si je devais le changer, je ne garderais que le “C”. » est une citation de Jim O’Neill extraite d’une interview donnée au Wall Street Journal en août 2013 et reprise dans de nombreux médias. Voir le site : www.huffingtonpost.com/parag-khanna/against-growth-market-pes_b_4603262.html.
5 « Même lorsque les deux [taux de change] réagissent aux mêmes types de nouvelles économiques, par exemple à des publications de données macroéconomiques ou à des changements politiques, le CNH est susceptible de réagir plus fortement puisqu’il n’y a pas de problèmes, ni de limites d’échanges à l’égard des actions de la banque centrale. » (Shu et al., 2014, p. 5).
6 Les paiements internationaux ayant besoin d’être réalisés dans des conditions de sécurité optimale, les messages sécurisés fournissant les instructions de paiement sont désormais indissociables des paiements eux-mêmes. SWIFT est l’institution qui produit les standards internationaux en termes de messagerie financière.
7 À l’exception de Hooley (2013, p. 309). Les informations à ce sujet ont été portées à notre connaissance par des rapports réalisés par des banques internationales. Voir notamment JP Morgan (2012), Aite Group (2014) et Deutsche Bank (2014).
8 La liste des établissements impliqués est donnée dans un communiqué de PBoC (2015).
9 Ce projet est aussi susceptible d’ouvrir de nouvelles portes au RMB. Par exemple, CLS – acteur majeur sur les marchés des changes – pose comme l’un de ses critères d’éligibilité d’une monnaie au sein de son système l’implication directe de la banque centrale dans la supervision des transferts financiers, ce qui sera effectif dans le nouveau système CNAPS/CIPS.
10 Ce qui, rappelons-le, est le lot du dollar australien, du franc suisse et, plus largement, des monnaies des pays développés à l’exception des États-Unis. Cette mobilité du RMB dans la hiérarchie constitue déjà en soi un phénomène d’émergence car à ce stade, la monnaie permet d’assurer une forme d’autonomie monétaire du pays émetteur, s’illustrant, par exemple, par une capacité d’endettement international en monnaie nationale.
11 « Nous défendons l’établissement d’un nouvel ordre économique et politique mondial équitable et rationnel. Nous nous opposons à toute forme d’hégémonisme et de politique du pouvoir. La Chine ne recherchera jamais l’hégémonie, ni l’expansionnisme. » (discours de Jiang Zemin, en 2002, alors président de la République populaire de Chine, cité par Chin, 2014, p. 190).
12 Bien que le projet de Zhou appelle à une nouvelle monnaie de réserve internationale et non à une refonte du système visant l’instauration d’une monnaie internationale fonctionnant selon les principes de la clearing union, telle que la souhaitait Keynes. L’opposition entre liquidité et clearing est ici fondamentale. Ses implications sont exposées dans un article d’Amato et Fantacci (2014).
13 Qui, par ailleurs, a eu pour résultat de ralentir la progression du commerce transfrontalier de la Chine en RMB sur la période hiver 2014-printemps 2015, celui-ci passant de 559 milliards de RMB en novembre 2014 à 538 milliards de RMB en janvier 2015 et à 436 milliards de RMB en octobre 2015, selon la PBoC.
14 Celles-ci ont atteint un niveau tel que la Chine semble prise au piège, résignée à soutenir le dollar contre sa volonté, pour éviter de voir s’effondrer la valeur – aujourd’hui estimée à plus de 3  000  Md$ – de son stock de réserves accumulées en dollars. C’est ce que Prasad (2014) décrit comme le dollar trap.
15 Joshua Aizenman écrit notamment : « On s’attend à ce que la part du commerce réglée en CNY continue de croître rapidement, puisqu’il y a une marge de manœuvre importante pour une internationalisation plus poussée du RMB dans le règlement du commerce international. Cette rapide internationalisation dans les échanges, cependant, ne rend pas nécessaire, ni même désirable l’internationalisation financière du RMB, un processus qui requiert une libéralisation financière beaucoup plus profonde. » (Aizenman, 2015, p. 14).
16 Les deux auteurs concluent l’un de leurs articles ainsi : « Pour les économies émergentes intéressées à ce qu’une large part de leurs bilans internationaux soit libellée dans leur propre monnaie, des marchés offshore peuvent aider à accroître la reconnaissance et l’acceptation de la monnaie parmi les exportateurs, les importateurs, les investisseurs et les emprunteurs en dehors du pays. Ce processus peut commencer (et non s’achever) en même temps que d’importants contrôles sur les capitaux toujours en vigueur, ceux-ci permettant aux autorités de maintenir un certain contrôle sur le rythme de libéralisation du compte de capital. » (He et McCauley, 2010, p. 24).
17 Susan Strange a notamment développé la notion de « pouvoir structurel » dont les quatre caractéristiques sont (1) l’exercice d’un contrôle sur la sécurité des autres nations, (2) un contrôle sur le système de production des biens et des services, (3) la capacité à déterminer et à influencer la structure de la finance internationale et du crédit, de manière à pouvoir en bénéficier, (4) le contrôle ou l’influence sur le savoir technique et informationnel ainsi que sur les connaissances technologiques et religieuses (Strange, 1987, p. 565). Il est alors intéressant de confronter ces caractéristiques à la réalité de l’économie internationale.

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