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 Il n'y a pas trop d'épargne, seulement de mauvaises politiques économiques


Olivier DAVANNE Université Paris-Dauphine et Sciences Po. Contact : olivier.davanne@sciencespo.fr.

Cet article rappelle pourquoi l'épargne semble aujourd'hui particulièrement abondante mais critique la notion d'« excès d'épargne ». Il défend l'idée selon laquelle, à moyen terme, une épargne importante peut être absorbée par l'investissement productif et, à ce titre, favorise la productivité et la croissance. La faible croissance européenne des dernières années n'était donc pas une fatalité liée à un excès d'épargne mais le résultat de politiques économiques frileuses qui ont laissé s'effondrer l'investissement productif sans réagir. Sur un plan structurel, il est cependant vrai que l'abondance de l'épargne pénalise les épargnants qui reçoivent un rendement réel médiocre, voire négatif, sur leurs placements. Dans ce contexte, la théorie économique parle de « suraccumulation » quand les taux d'intérêt réels à très long terme sont inférieurs au taux de croissance potentiel de l'économie. Dans ces situations, la dette publique ne pèse sur aucune génération et l'objectif d'équilibre budgétaire perd de sa légitimité. Par ailleurs, dans son survol des « mauvaises politiques économiques » liées à l'épargne, cet article s'inquiète de la capacité des institutions financières à continuer à prêter lors de la prochaine récession, dans un contexte où elles sont maintenant menacées par l'utilisation de pouvoirs de résolution très peu encadrés.

La thèse de l'excédent d'épargne gagne de plus en plus d'adeptes dans le débat public. Elle repose sur deux types d'inquiétudes. D'une part, l'arbitrage trop favorable à l'épargne au niveau mondial expliquerait en partie la lenteur de la reprise mondiale après la grande crise financière des années 2008-2009. En d'autres termes, les opportunités d'investissement dans l'économie mondiale ne seraient malheureusement pas à la hauteur des fonds disponibles. De façon étonnante, on assiste ainsi sur le plan des idées à une sorte de résurrection du keynésianisme de long terme des années 1940 et 1950, courant théorique pessimiste qui s'inquiétait déjà d'une insuffisance structurelle de la demande1. D'autre part, au-delà de la question de la croissance économique, cette épargne abondante, assez concentrée dans la fraction la plus aisée de la population, conduirait à une explosion insoutenable des inégalités. Les patrimoines et les revenus des plus « riches » progresseraient de façon exponentielle au détriment du reste de la population.

Cette attaque sur deux fronts contre l'épargne nous semble naïve car elle oublie souvent tous les bénéfices directs et indirects tirés par la société des taux d'intérêt bas qui résultent d'une épargne abondante. Nous défendrons ici que cette épargne abondante est une chance, à condition que les politiques économiques dans leurs multiples dimensions y répondent intelligemment.

Dans une première partie, nous rappellerons rapidement les raisons pour lesquelles les conditions de l'équilibre épargne-investissement pourraient s'être profondément modifiées depuis le début du xxie siècle. On ne peut exclure que les taux d'intérêt réels d'équilibre qui en résultent soient très bas, voire légèrement négatifs. Faut-il s'en inquiéter ? Dans cette partie, nous revenons sur les inquiétudes associées à l'excès d'épargne et insistons sur les bénéfices, parfois diffus, de ces taux d'intérêt bas, notamment pour la partie la moins riche de la population. La faible croissance actuelle nous semble surtout résulter des erreurs de politique macroéconomique commises dans la zone euro depuis dix ans. Mais les défis d'une épargne abondante pour les pouvoirs publics ne s'arrêtent pas à la question des politiques de stabilisation conjoncturelle. Nous rappellerons dans la deuxième partie qu'à un certain niveau d'épargne, son utilisation la plus efficace peut nécessiter de façon structurelle la présence de la dette publique. Faute d'études suffisamment quantifiées sur le volume d'épargne disponible et les opportunités d'investissement, il est difficile de savoir si nous sommes déjà arrivés aujourd'hui à cette situation dite de « suraccumulation ». Par ailleurs, le bon emploi de l'épargne nécessite une régulation adaptée des institutions financières et nous reviendrons brièvement sur cette question essentielle dans la troisième partie.

Croissance et excès d'épargne

À court terme, la politique monétaire a une grande influence sur le niveau des taux d'intérêt, surtout sur les échéances les plus courtes. Mais sur le long terme, la politique monétaire ne peut pas manipuler la réalité de l'équilibre entre épargne et investissement. Si l'offre de fonds est structurellement importante relativement aux opportunités d'investissement, les taux d'intérêt réels seront en moyenne faibles au cours du cycle économique. Symétriquement, une offre de fonds limitée conduira à des taux d'intérêt réels élevés. Toute tentative durable d'une banque centrale de s'opposer aux équilibres fondamentaux entre épargne et investissement conduira soit à l'inflation ou même à l'hyperinflation (maintien de taux d'intérêt monétaire trop bas), soit à la déflation (maintien de taux d'intérêt monétaire trop élevés).

Or au-delà des fluctuations conjoncturelles sur lesquelles nous reviendrons, plusieurs phénomènes concourent probablement à maintenir à un niveau élevé l'épargne mondiale (Rachel et Smith, 2015). D'une part, après la grave crise financière de 1997-1998, la plupart des pays émergents souhaitent éviter de s'endetter fortement à l'étranger afin de ne pas s'exposer aux sautes d'humeur des marchés financiers. D'autre part, la montée des inégalités a un impact sur l'offre de fonds prêtables dans la mesure où les « riches » ou « super-riches » sont évidemment plus à même de constituer des patrimoines conséquents2. Enfin, le vieillissement de la population joue probablement un rôle considérable dans la pression à la baisse qui s'exerce sur les taux d'intérêt réels. Le patrimoine détenu par les seniors est bien sûr beaucoup plus élevé que celui des jeunes actifs. Ces derniers sont même en moyenne des « absorbeurs » d'épargne dans la mesure où ils financent par de la dette leurs différents investissements, notamment immobiliers.

Le rôle joué par le vieillissement est renforcé par les réformes des régimes de retraite dans la plupart des pays. La volonté d'alléger l'impact du vieillissement sur les finances publiques conduit généralement à revoir à la baisse la générosité des régimes par répartition, et à favoriser un accroissement de la part de la capitalisation. Or avec des taux d'intérêt bas, il faut accumuler un patrimoine considérable pour obtenir un revenu de remplacement significatif en période de retraite3. Il est frappant de constater que toutes ces réformes des régimes de retraite ont été faites sans la moindre attention portée à la capacité du système productif à absorber cette épargne supplémentaire. Dans ce contexte, il faut noter une spécificité un peu inquiétante de l'épargne-retraite : sa relation avec le niveau des taux d'intérêt réels est probablement l'inverse de celle que l'on attend usuellement. En général, il est admis que la volonté d'épargner baisse quand la rémunération de l'épargne baisse (effet dit de « substitution » : la baisse des taux d'intérêt incite à consommer aujourd'hui plutôt que dans le futur). Or concernant l'épargne-retraite, la baisse de rendement conduit à épargner plus pour atteindre ses objectifs de rente future (effet dit de « revenu » : le futur retraité est appauvri par le faible rendement du capital et doit épargner plus4). Avec le vieillissement de la population, on ne peut donc exclure un cercle vicieux où le marché de l'épargne peinerait à s'équilibrer de façon satisfaisante : comment assurer l'équilibre épargne-investissement si pour une fraction significative de l'épargne, celle-ci tend plutôt à augmenter quand les taux d'intérêt baissent ? La question centrale est alors du côté de l'investissement : est-il suffisamment réactif dans la durée pour absorber l'épargne générée par les ménages ?

Pour analyser cette question centrale, il semble nécessaire de distinguer quatre types d'actifs réels qui constituent la contrepartie de l'épargne constituée par les ménages (nous laissons ici de côté la question de la dette publique qui absorbe également l'épargne disponible et sur laquelle nous reviendrons dans la section suivante). Il y a en premier lieu le capital productif matériel (machines, bâtiment) et immatériel (brevets, marques) utilisé par les entreprises. Il y a ensuite les infrastructures (routes, ponts, chemins de fer, etc.). Il y a en troisième lieu le considérable capital-logement qui résulte des investissements réalisés (c'est-à-dire les bâtiments eux-mêmes, hors prise en compte du foncier). Il y a enfin tous les actifs réels « rares » dont l'offre est totalement ou partiellement rigide et ne dépend pas ou peu d'éventuels nouveaux investissements (en premier chef, il s'agit du foncier, mais il faut aussi mentionner les œuvres d'art, les voitures de collection, l'or5, etc.).

Le capital productif des entreprises n'est probablement pas massivement sensible dans la durée au niveau des taux d'intérêt. Les techniques de production peuvent certes évoluer en fonction du coût du capital (c'est-à-dire le recours à l'automatisation), mais les ordres de grandeur généralement retenus pour les possibilités de substitution capital/travail ne sont généralement pas très rassurants. Les deux autres types de capital sont probablement beaucoup plus réactifs : la possibilité de financer les infrastructures dépend beaucoup des taux d'intérêt et des taux d'intérêt réels bas incitent fortement à investir dans la pierre (plus de mètres carrés et meilleure qualité de construction). Cette sensibilité des différents types d'investissements est-elle suffisante pour éviter le piège d'une épargne trop abondante qui ne trouverait pas à s'employer ? Nous n'en savons rien et comme il a déjà été souligné, sauf erreur de notre part, cette question fondamentale n'a jamais été abordée de façon approfondie quand il s'est agi de réformer les régimes de retraite dans les différents pays. Mais dans ce domaine, les actifs réels « rares » offrent une sorte de joker et limitent probablement le risque de baisse cumulative des taux d'intérêt réels ! Il est important de comprendre pourquoi.

Le détenteur d'un actif réel rare en tire une rémunération explicite (loyer) ou implicite (les charmes de la vie au centre d'une métropole, le plaisir des yeux pour une œuvre d'art). Quand les taux d'intérêt réels baissent, la valeur de ces actifs rares augmente mécaniquement et c'est bien ce que l'on observe depuis des années, notamment concernant l'immobilier de centre-ville. En principe, la présence de ces actifs réels porteurs d'une rémunération structurellement positive devrait interdire le passage durable des taux d'intérêt réels en territoire négatif. En effet, pourquoi accepter une rémunération négative sur un placement financier, alors qu'il existe des actifs réels offrant une rémunération structurellement positive ? Ainsi, dans la durée, une hausse de l'épargne devrait se traduire par, d'une part, une augmentation des investissements matériels et immatériels (machine, brevets, constructions résidentielles et non résidentielles) et, d'autre part, une augmentation rapide de la valeur des actifs rares sans que les taux d'intérêt réels puissent devenir massivement négatifs. En d'autres termes, les actifs réels rares offrent une importante réserve de valeur sur laquelle l'épargne peut s'investir. Cette réserve de valeur est en quelque sorte endogène : plus l'épargne est importante, plus la valorisation des actifs rares est importante et donc susceptible de répondre à la volonté d'accumulation patrimoniale des ménages.

Il est important de remarquer que ce mécanisme de valorisation des actifs rares n'interdit cependant pas totalement des taux d'intérêt réels durablement négatifs. En effet, ces actifs réels rares présentent un risque de valorisation, notamment quand leurs prix deviennent très élevés, et donc certains investisseurs peuvent préférer la détention d'obligations d'État jugées beaucoup moins risquées en dépit d'un rendement réel négatif. Mais il s'agit cependant d'un mécanisme très puissant d'équilibrage du marché de l'épargne, qu'il faut prendre en compte si l'on veut juger des risques d'excédent durable d'épargne, et des mérites du keynésianisme de long terme.

Au final, il semble très peu probable qu'une épargne abondante puisse constituer un frein structurel à la croissance d'un pays considéré. Dans la durée, une telle épargne doit être absorbable, dans le pays considéré ou à l'étranger, dans de l'investissement productif (un peu), dans les infrastructures et l'investissement logement (beaucoup) et, en dernier recours, recyclable dans l'achat d'actifs réels rares, dont le prix augmente. À l'équilibre, les taux d'intérêt réels des différents pays ne sont pas forcément positifs, mais il est peu probable qu'ils s'effondrent année après année sans parvenir à rétablir l'équilibre économique. De plus, toutes choses égales par ailleurs, plus l'épargne est abondante, plus l'investissement productif doit être élevé, ce qui est favorable à la productivité de l'économie et donc à la rémunération des salariés. Ces derniers bénéficient aussi d'un accès au crédit à des conditions favorables, et donc d'un accès facilité à la propriété (sauf dans les zones où le foncier flambe, nous allons y revenir).

Cette vision optimiste des équilibres de long terme suppose cependant que les pouvoirs publics ne laissent pas s'instaurer le cercle vicieux parfaitement décrit par le keynésianisme de court terme. En d'autres termes, il est essentiel de rappeler qu'à court terme, l'investissement est moins sensible aux taux d'intérêt qu'aux perspectives de demande. Sans soutien public, monétaire et/ou budgétaire, une hausse de l'épargne tend à créer à court terme une spirale dépressive, voire déflationniste, dont il devient très difficile de sortir. Cette observation est bien sûr illustrée par la zone euro qui n'a jamais su depuis la crise financière de 2008 soutenir vigoureusement de façon transitoire la demande adressée à ses entreprises et qui a assisté sans réagir suffisamment vite à un effondrement de son investissement productif. D'une part, la politique monétaire a réagi plus tardivement qu'aux États-Unis et au Royaume-Uni, avec notamment deux hausses de taux d'intérêt décidées à contretemps par la Banque centrale européenne (BCE), à l'été 2008 et à l'été 2011. D'autre part, et surtout, le rythme de l'assainissement des finances publiques au niveau de la zone a insuffisamment tenu compte de la situation économique sous-jacente, avec notamment un effort massif de réduction des déficits en 2011-2013, alors que l'économie européenne retombait en récession.

En d'autres termes, l'équilibrage entre épargne et investissement n'a rien d'automatique et nécessite parfois un certain activisme des politiques monétaires et budgétaires. Sur ces questions, les débats en Europe sont loin d'être achevés. Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain : ce n'est pas parce que les politiques macroéconomiques de la zone euro ont failli qu'il faut contester les bénéfices tirés dans la durée d'une épargne abondante !

Suraccumulation et dette publique

Une hausse de l'épargne disponible bénéficie toujours aux moins favorisés qui ont un faible patrimoine. C'est une observation fondamentale. Mais qu'en est-il de la situation des détenteurs du capital ? A priori, leur situation se dégrade puisque le rendement qu'ils reçoivent se contracte. La situation est cependant un petit peu plus complexe du fait de l'effet de valorisation déjà signalé. Les détenteurs du patrimoine peuvent bénéficier de la hausse des prix pour le foncier et les autres actifs rares (œuvres d'art, etc.). Mais évidemment il s'agit d'un effet ponctuel qui ne bénéficie qu'à une génération (et peut-être à ses héritiers), celle présente au moment où l'épargne a augmenté. Pour les générations suivantes de « riches », l'accès à la propriété des actifs rares (par exemple, un appartement de centre-ville dans une métropole) va être plus difficile et leur situation va probablement se dégrader. Donc une hausse de l'épargne favorise durablement ceux qui ne constitueront jamais un patrimoine important, défavorise en contrepartie les futures générations de « riches », mais apporte peut-être un bénéfice ponctuel à la génération actuelle des « possédants » qui bénéficient d'un choc durable à la hausse sur la valorisation des actifs rares (mais sont bien sûr aussi directement pénalisés par la baisse de rendement sur les autres actifs qu'ils détiennent6).

Dans ces conditions, existerait-il un niveau optimal d'épargne pour la société prise globalement ? Cette question est très présente dans la théorie de la croissance des années 1960 qui a introduit le concept clé de « suraccumulation ». L'idée centrale est qu'à un certain stade, une épargne abondante pénalise dans la durée les détenteurs du capital au-delà du bénéfice qu'en tirent ceux qui possèdent peu. Cette suraccumulation intervient quand les taux d'intérêt réels tombent durablement sous le taux de croissance économique. Il y a alors une forme d'inefficacité économique et il est en principe possible d'améliorer le sort des « riches » sans pénaliser les moins favorisés en utilisant intelligemment les différents instruments de politique économique, notamment les taux d'imposition sur les différentes formes de revenus.

Pour illustrer de façon schématique ce phénomène, prenons le cas d'une économie avec une croissance potentielle réelle de 1,5 %, une inflation de long terme de 2 % et des taux d'intérêt réels nuls sur la dette publique (taux nominaux de 2 %). Imaginons d'abord que les pouvoirs publics se fixent un objectif d'équilibre budgétaire en moyenne au cours du cycle. La dette nominale sera ainsi stabilisée et le poids relatif de la dette publique diminuera ainsi tendanciellement en proportion d'un PIB qui lui augmente. Ce sera aussi le cas de la charge de la dette. Les impôts financeront donc à terme quasi intégralement les « bonnes » dépenses publiques, pas les intérêts, et c'est d'ailleurs le bénéfice attendu à long terme de cette politique vertueuse. Maintenant que se passe-t-il si le déficit public est maintenu à 3 % du PIB ? Dans ce cas-là, la dette publique en proportion du PIB se stabilisera à un niveau élevé : 85,7 %7. Le budget devra donc supporter structurellement une lourde charge d'intérêts, soit 1,7 % (85,7 % × 2 %) du PIB. Mais comme le déficit public est maintenu à 3 % du PIB, les nouveaux emprunts font plus que couvrir cette charge d'intérêts : les impôts sont structurellement inférieurs de 1,3 % du PIB à leur niveau en l'absence de dette publique. Le vice paie ! Il est facile de vérifier que cette situation paradoxale prévaut dès que les taux d'intérêt sur la dette publique sont durablement inférieurs au taux de croissance économique8.

Quand les taux d'intérêt sont très bas, un pays peut ainsi s'endetter pour payer ses intérêts sans craindre de voir sa dette exploser en proportion du PIB. Cela ouvre en principe des marges de manœuvre pour des politiques où toutes les catégories sociales sont gagnantes. Par exemple, les impôts peuvent être baissés sur les revenus du travail, tandis que les épargnants profitent de la remontée des taux d'intérêt induite par une dette publique plus élevée9.

Ce qui précède ne constitue évidemment pas un plaidoyer de principe pour le laxisme budgétaire. Il faut notamment observer qu'une dette publique importante expose les contribuables aux risques d'une forte remontée des taux d'intérêt qui pénaliserait considérablement les générations futures. Ainsi un pays qui profiterait de taux d'intérêt très bas pour maintenir une dette publique conséquente devrait impérativement le faire en s'endettant sur des échéances très longues (idéalement en émettant de la dette perpétuelle pour être sûr de ne pénaliser aucune génération). Pour cette raison, ce sont les taux d'intérêt à très long terme qui constituent le juge de paix de la suraccumulation : quand ces derniers sont inférieurs au taux de croissance de long terme de l'économie, les pouvoirs publics disposent de marges de manœuvre pour optimiser l'utilisation de cette épargne abondante. Un endettement public maîtrisé est alors préférable à une situation de taux d'intérêt excessivement bas qui a pour principal effet de pousser à la hausse la valorisation des actifs rares.

Au final, il serait tout à fait rationnel que le niveau des taux d'intérêt de très long terme joue un rôle dans les objectifs budgétaires que se fixent les gouvernements. La fameuse « règle d'or » de la théorie de la croissance des années 1960 stipulait d'ailleurs que l'optimum économique était atteint quand le taux de croissance convergeait durablement vers le taux d'intérêt réel. Cette « règle d'or » d'origine académique n'a ainsi pas grand-chose à voir avec les cibles rigides d'équilibre budgétaire à moyen terme qui se sont imposées en Europe.

Primes de risque et politiques publiques

Une épargne abondante doit engendrer à moyen et long terme un stock de capital élevé (machines, brevets, bâtiments, etc.) et une forte valorisation des actifs rares, en premier lieu le foncier. Les avantages mais aussi les conséquences d'une situation de suraccumulation ont été discutés dans les deux sections précédentes.

Une épargne abondante à l'échelle nationale ou au niveau mondial suscite des inquiétudes particulières quand elle privilégie les placements sans risque, alors que les opportunités d'investissement présentent toutes, à des degrés divers, une dose de risque. En d'autres termes, l'inquiétude porte souvent au moins autant sur la structure de l'épargne des ménages que sur son montant. Le décalage apparent entre la structure de l'épargne et celle des opportunités d'investissement semble en effet produire deux types de conséquences défavorables. D'une part, on peut craindre que l'extrême prudence des épargnants ne nourrisse in fine l'instabilité financière. En effet, l'épargne qui privilégie la sécurité se dirige principalement vers des produits de dette, qui garantissent un revenu fixe sauf faillite du débiteur, plutôt que vers des titres représentatifs des fonds propres, qui associent de façon plus régulière l'investisseur aux profits et pertes générés par le projet financé. Ce financement fondé sur la dette semble fragiliser l'économie et crée le risque d'un processus cumulatif de faillites dans les phases de récession. D'autre part, l'économie s'appauvrit par de multiples canaux quand l'épargne est principalement placée dans des actifs peu risqués, dans le pays considéré, voire dans d'autres pays (par exemple, en finançant la dette publique des pays voisins).

La première inquiétude, associant mécaniquement dette et instabilité financière, nous semble beaucoup moins fondée que la seconde. En principe, un système financier efficace devrait savoir s'accommoder de la présence de ces investisseurs réticents à la prise de risque et garantir la compatibilité entre l'aversion au risque de l'investisseur moyen et les caractéristiques de risque des investissements réalisés. Par exemple, les investissements dans les infrastructures sont moins risqués que les investissements en équipement des entreprises, et le financement du logement peut être plus ou moins risqué selon les caractéristiques de revenu et de patrimoine des ménages concernés (distinction prime et subprime aux États-Unis). Ainsi une économie avec peu d'investisseurs prêts à supporter des risques pourrait être une économie de dette, mais finalement peu vulnérable au risque de crise financière si ces dettes, celles des banques ou celles des entreprises non financières, financent des investissements très peu risqués. La forte aversion au risque des investisseurs produira alors des taux d'intérêt réels très bas, des primes de risque élevées au bénéfice des épargnants plus aventureux, mais pas forcément une instabilité financière particulièrement forte.

Cependant plusieurs mécanismes peuvent venir perturber la nécessaire cohérence entre l'aversion au risque des investisseurs et la nature des investissements financés. Et dans ce domaine, la frontière est souvent étroite entre les bonnes politiques publiques qui réduisent les risques financiers et les mauvaises qui nourrissent involontairement l'instabilité ! Deux mécanismes fondamentaux peuvent être mentionnés.

Les asymétries d'information

Les épargnants n'ont bien sûr qu'une connaissance très imparfaite des risques qu'ils supportent sur leurs placements. Ces risques sont mieux connus par les entreprises et les banques qui les financent. Au sein même des banques, la haute hiérarchie peut, elle-même, avoir une connaissance limitée des risques pris par les différentes divisions. Or il est bien connu que les systèmes de rémunération peuvent conduire les décideurs aux différents niveaux hiérarchiques à faire porter sur les épargnants, actionnaires ou porteurs des titres de dettes, un risque excessif. Certes le système financier est organisé pour réduire dans une certaine mesure ces asymétries d'information. Les analystes financiers10 évaluent le risque supporté par les actionnaires et les agences de notation se concentrent sur les risques de défaut supportés par les détenteurs des titres de dettes. Mais ces « contrôleurs » privés peuvent se tromper, par manque de moyens ou en réponse à de mauvaises incitations, et, par exemple, les agences de notation ont totalement failli aux États-Unis, au cours des années 2000-2006, dans l'évaluation du risque des nouveaux produits financiers complexes fabriqués par les banques en contrepartie des prêts immobiliers subprime consentis à des ménages très peu solvables.

Les garanties publiques

Les asymétries d'information perturbent les prises de risque et constituent la justification fondamentale des diverses régulations financières. Celles-ci limitent de façon assez radicale les prises de risque (ratios de solvabilité) pour protéger les détenteurs de dette et tentent parfois d'améliorer les incitations (encadrement des modes de rémunération). Mais l'action des pouvoirs publics ne va pas toujours dans le sens de meilleures incitations ! En effet, de nombreuses politiques publiques viennent perturber l'évaluation du risque car les États offrent, ou plutôt offraient, de nombreuses protections mal définies aux titres émis par les institutions financières. Une partie du risque des investissements est ainsi transférée aux pouvoirs publics. D'une part, les banques pouvaient, et peuvent toujours, compter sur l'action du prêteur en dernier ressort : si les créanciers à court terme des banques prennent peur et arrêtent de financer un établissement, le prêteur en dernier ressort accepte de se substituer. Il exige comme garantie de ses prêts un collatéral de moins bonne qualité que celui demandé par les prêteurs privés. Ce faisant, le prêteur en dernier ressort ne fait pas une opération totalement dénuée de risque : ce collatéral de moindre qualité peut perdre de sa valeur dans des scénarios économiques particulièrement défavorables. En d'autres termes, il prête certes en principe à des établissements initialement solvables, mais rien ne garantit à 100 % que ces derniers le resteront à l'avenir. D'autre part, historiquement, la politique de prêts en dernier ressort a été complétée par la politique dite « du too big to fail » : les établissements de grande taille, dits « systémiques », étaient secourus même s'ils devenaient insolvables et manquaient de collatéral de qualité, afin d'éviter le risque d'une panique financière. Ces deux politiques – prêts en dernier ressort et application du principe du too big to fail – transfèrent une partie du risque des investissements effectués par les banques vers les pouvoirs publics. C'est notamment le cas des risques extrêmes liés aux scénarios économiques les plus défavorables ayant une faible probabilité d'occurrence. Elles permettent ainsi aux banques d'accroître leur exposition aux pertes au-delà de ce qu'autoriserait en principe la tolérance au risque de leur base d'investisseurs. La présence du prêteur en dernier ressort les autorise notamment à émettre massivement des titres à court terme jugés très sûrs par les investisseurs. En effet, ces derniers ont l'assurance de pouvoir récupérer leur argent dès qu'apparaissent les premiers doutes sur la solidité des banques.

Cet encouragement public à la prise de risque et à l'endettement en période économique normale a cependant de nombreux défauts. D'une part, à l'occasion des crises économiques, les pertes pour les contribuables se sont parfois révélées considérables. D'autre part, les garanties publiques sont généralement implicites et définies de façon très ambiguë. Les pouvoirs publics se laissaient traditionnellement de grandes marges de manœuvre dans l'octroi de prêts en dernier ressort en période de crise (c'est-à-dire dans la définition des actifs éligibles comme collatéral des prêts publics) et, encore plus, dans l'application du principe du too big to fail. En période de stress économique, cette ambiguïté des pouvoirs publics a constitué un facteur important d'instabilité des marchés financiers.

Pour ces différentes raisons, des réformes radicales ont été introduites après la crise financière des subprimes de 2007 à 2009. À tort ou à raison, le principe des prêts publics en dernier ressort n'a pas été remis directement en question, mais l'introduction de nouveaux ratios contraignants en matière de liquidité empêche maintenant les banques d'abuser des financements à très court terme, pourtant les moins coûteux pour elles. Par ailleurs, le vieux principe du too big to fail a été officiellement abandonné : le risque en cas de grave crise économique n'est plus transféré aux finances publiques et les pouvoirs publics, dotés de nouveaux « pouvoirs de résolution », se donnent en principe les moyens de faire participer tous les créanciers à la recapitalisation des banques en difficulté.

Ces réformes semblent aller dans le bon sens en obligeant les banques à mieux aligner le risque de leurs investissements avec la tolérance au risque de leur base d'investisseurs. On peut cependant se demander si le retour de balancier n'a pas été excessif : après avoir traditionnellement trop encouragé la prise de risque par les institutions financières, les pouvoirs publics ne vont-ils pas commettre l'erreur inverse et contraindre les banques à une excessive prudence et limiter ainsi leur participation au financement de l'investissement productif ? Les pouvoirs de résolution introduits après la crise récente prévoient explicitement l'expropriation des actionnaires des banques fragiles. Pour protéger les contribuables, ils perdraient la totalité de leurs investissements alors même que la banque a encore une valeur nette positive. Cette politique à la fois précautionneuse et punitive est explicitement exigée par les standards internationaux portant sur ces pouvoirs de résolution : « The resolution regime should provide for timely and early entry into resolution before a firm is balance-sheet insolvent and before all equity has been fully wiped out. » (FSB, 2011). Les actionnaires ont d'autant plus de raisons de s'inquiéter que les pouvoirs publics n'ont aucunement indiqué comment, en période de stress économique, ils pourront juger de la solvabilité des banques et de la nécessité ou non d'appliquer ces pouvoirs de résolution.

En cas de nouvelle profonde récession, il est probable que les banquiers limiteront drastiquement les crédits distribués pour se protéger de nouvelles pertes qui pourraient conduire à l'expropriation des actionnaires accompagnée de leur licenciement. Dans les situations économiques tendues, au moment précis où il faudrait convaincre les investisseurs privés d'accepter une dose accrue de risque dans leurs investissements, tout serait fait au contraire pour les inciter à se replier vers les actifs dits « sans risques » (les obligations d'État) (Davanne, 2016a).

Dans les périodes de stress économique, il est pourtant important que le secteur public soutienne le secteur bancaire et la distribution de crédit plutôt que d'encourager des mouvements de panique. Tout l'enjeu est d'éviter que ce soutien ne se traduise par des subventions implicites considérables et une prise de risque excessive des banques pouvant conduire à des pertes abyssales pour les contribuables. En d'autres termes, ce soutien, par exemple sous la forme d'une participation publique aux conditions de marché aux opérations de recapitalisation, doit s'effectuer assez tôt, quand la banque est encore largement solvable, et doit s'accompagner d'un contrôle étroit des activités de la banque jugée fragile (Davanne, 2015).

Au final, sous réserve d'une politique adéquate de régulation financière, la forte aversion pour le risque des épargnants semble gérable par le système financier. Cela ne fait pas disparaître la deuxième inquiétude fondamentale qui a déjà été mentionnée : une épargne sans risque est une épargne qui n'enrichit que peu ou pas du tout le pays considéré. Les principaux perdants sont les épargnants eux-mêmes qui reçoivent un rendement très médiocre. Il est probable qu'il serait très souvent dans leur intérêt bien compris d'accepter une dose de risque supplémentaire pour doper le rendement de leur épargne, notamment l'épargne-retraite à long terme. Mais l'instabilité financière et l'alternance de « bulles » et de « krachs » n'incitent guère la plupart des ménages peu sophistiqués à franchir le pas ! Une question fondamentale est ainsi celle de la création de nouveaux produits d'épargne à moyen terme, qui rassurent et répondent aux besoins des épargnants. L'épargnant a notamment besoin d'être mieux guidé pour naviguer dans l'instabilité permanente des marchés financiers et anticiper les véritables conséquences pour leur situation future des mouvements de marché. Une forte baisse des marchés d'actions, par exemple, n'a pas le même impact selon qu'elle s'interprète comme une panique irrationnelle et réversible ou résulte d'une véritable dégradation structurelle de la situation des entreprises. Or la gestion financière traditionnelle est très faible dans cette dimension d'explication et d'accompagnement à moyen terme des épargnants (Davanne, 2016b).

Le chantier des nouveaux produits d'épargne à proposer aux ménages est ainsi très important. Il est cependant surprenant de voir que cette question est souvent abordée sous un angle un peu différent, en s'inquiétant non de la faiblesse des rendements offerts aux épargnants, mais en insistant sur le financement de l'économie. Une idée centrale semble être celle des externalités positives liées à une épargne risquée abondante. Elle permettrait de financer des investissements qui amélioreraient le bien-être de tous (infrastructures, innovations, etc.) et pas seulement celui des épargnants. Cet accent mis sur les externalités positives nous semble cependant discutable. D'une part, les externalités produites par les nouveaux investissements, c'est-à-dire la part de leur rendement qui n'est pas directement captée par les financeurs, sont extrêmement variables selon la nature des investissements. Elles sont probablement particulièrement fortes dans le domaine de l'innovation dans la mesure où les brevets ne protègent probablement pas totalement les innovateurs contre les imitateurs. Mais si les pouvoirs publics souhaitent encourager spécifiquement l'innovation, ils peuvent le faire par des subventions ciblées sans multiplier les avantages fiscaux non ciblés en faveur de l'épargne à risque. C'est d'ailleurs ce qui est déjà massivement fait en France avec le crédit d'impôt recherche. D'autre part, sur les marchés des capitaux globalisés, l'épargne d'un pays n'est pas spécifiquement affectée aux investissements du pays considéré. C'est une raison supplémentaire pour privilégier les aides ciblées aux investissements nationaux à fortes externalités (infrastructures, innovations, etc.), aides qui ont l'avantage de ne pas « fuiter » au bénéfice des pays étrangers.

Conclusion

Nous avons insisté dans cette contribution sur les mérites d'une épargne abondante, notamment compte tenu de ses effets positifs induits sur la fraction la moins riche et la plus jeune de la population. L'un des points clés que nous défendons ici est que l'épargne des « riches » n'est pas un facteur qui augmente la tendance sous-jacente aux inégalités (liée aux innovations technologiques, à la mondialisation, etc.), mais au contraire une force probablement contracyclique qui freine le creusement en cours (inquiétant) des inégalités. En clair, le monde ne serait pas nécessairement meilleur avec des « riches » achetant plus de voitures de grand luxe ou de yachts et épargnant moins !

Il n'en reste pas moins que le bon emploi de cette épargne requiert à plusieurs niveaux la vigilance des pouvoirs publics. Il y a d'abord la question fondamentale de la dynamique économique de court terme et de la nécessité d'éviter les spirales dépressives liées à un manque de demande. Il y a ensuite la question sensible et insuffisamment débattue de la dette publique optimale à moyen terme dans un contexte de taux d'intérêt réels stabilisés à un niveau très faible. Il y a enfin les interrogations portant sur le contrôle public des institutions financières et sur le traitement des banques jugées fragiles.

Soulignons en conclusion que ces différentes questions se posent avec une acuité toute particulière dans la zone euro. Cette dernière n'a pas su gérer correctement l'après-crise de 2008 et en est encore à se débattre contre les risques de déflation, en utilisant tardivement les instruments non conventionnels de la politique monétaire. Elle affiche par ailleurs un objectif de suppression du déficit public à moyen terme sans aucune prise en compte du contexte de taux d'intérêt. Last but not least, en matière bancaire, elle semble ignorer les risques liés à l'utilisation brutale des pouvoirs de résolution, alors qu'avec des institutions financières plus fragiles que dans d'autres régions du monde, elle devrait activement chercher à définir un mode original et plus efficace de traitement des crises bancaires.


Notes

1 Ce keynésianisme de long terme, formalisé dans le célèbre modèle d'Harrod et Domar, a ensuite progressivement sombré dans l'oubli, victime collatérale de la forte croissance économique d'après-guerre. Ce ne fut bien sûr pas le cas du keynésianisme de court terme, qui insiste à juste titre sur la récurrence de crises cycliques liées à une insuffisance conjoncturelle et non structurelle de la demande (baisse transitoire des stocks, de l'investissement et hausse procyclique de l'épargne de précaution).
2 Nous ne reviendrons pas dans cette contribution sur les spécificités et l'origine de cette montée des inégalités, probablement associée à la mondialisation, l'évolution des technologies et une certaine financiarisation de l'économie.
3 Prenons le cas simple de taux d'intérêt réels nuls. Au moment où l'on cesse son activité professionnelle, il faut avoir constitué un patrimoine égal au produit de son espérance de vie par le revenu annuel recherché. Ainsi si l'on cherche un revenu de remplacement représentant 20 % de sa rémunération d'activité et que l'espérance de vie est de vingt ans, le patrimoine financier constitué lors du départ en retraite doit représenter quatre fois la dernière rémunération annuelle d'activité !
4 Il faut cependant noter que l'effet substitution n'est pas totalement absent de l'épargne-retraite : des taux d'intérêt bas peuvent aussi désinciter à épargner et encourager à la place un prolongement de la vie active.
5 Le stock d'or est assez rigide même si le rythme d'extraction par les mines dépend du prix de l'or. On estime souvent que plus de la moitié de l'or disponible sur Terre a déjà été extrait.
6 Il faut cependant noter qu'il peut y avoir de façon transitoire un effet positif de valorisation sur des actifs qui ne sont pourtant pas structurellement rares, comme le capital productif. Par exemple, dans la durée, les entreprises doivent valoir le capital matériel et immatériel qu'elles utilisent. Mais dans un contexte de hausse de l'épargne, de baisse des taux d'intérêt et d'euphorie boursière, elles peuvent transitoirement être mieux valorisées.
7 Car une dette publique représentant 85,7 % du PIB croît tous les ans de 3/85,7 quand le déficit public est de 3 % du PIB. Or 3/85,7 est exactement la croissance du PIB nominal (3,5 %).
8 Rappelons la relation comptable toute simple qui existe dans la durée entre dette publique, taux d'imposition et taux d'intérêt. Toutes les variables qui suivent sont exprimées en % du PIB. Appelons x les dépenses publiques hors intérêts, d la dette publique, t le taux moyen d'imposition, r le taux d'intérêt moyen sur la dette publique et g le taux de croissance. Le déficit public en pourcentage du PIB est : x + r × dt. À l'équilibre à long terme, la dette croît comme le PIB, c'est-à-dire que le déficit doit être égal à g × d. D'où t = x + (rg) × d. Si le taux d'intérêt est inférieur au taux de croissance, les impôts seront d'autant plus bas que le pays est endetté !
9 Les non-épargnants pâtissent cependant par ailleurs indirectement de la hausse des taux d'intérêt (sur le coût de leurs crédits ou le niveau de leurs salaires). Pour les compenser, il faut éventuellement réduire un peu le bénéfice que tirent les épargnants de la hausse des taux d'intérêt (hausse de la fiscalité sur les revenus du capital). La politique optimale peut ainsi être complexe, mais il n'en reste pas moins que des taux d'intérêt inférieurs à la croissance économique ne constituent pas un optimum économique.
10 Sell-side quand ils travaillent pour les courtiers ou buy-side quand ils travaillent pour les sociétés de gestion.

Bibliographies

Davanne O. (2015), « Les mystères de la liquidité. Plaidoyer pour la « bonne » transformation bancaire », Revue française d'économie, vol. 30, no 2015/2, pp. 49-91.
Davanne O. (2016a), « Les nouveaux risques systémiques », in de Boissieu C. et Chesneau D. (dir.), Financer l'économie réelle, Eyrolles.
Davanne O. (2016b), « Les retraites : pourquoi de nouvelles réformes après 2017 ? », in Lorenzi J.-H. (dir.), Choc démographique, rebond économique, Descartes & Cie.
FSB (Financial Stability Board) (2011), « Key Attributes of Effective Resolution Regimes for Financial Institutions », octobre, www.fsb.org/wp-content/uploads/r_111104cc.pdf.
Rachel L. et Smith T. (2015), « Secular Drivers of the Global Real Interest Rate », Bank of England, Staff Working Paper, n° 571.