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 Anticipation du risque de dépendance et patrimoine


Luc ARRONDEL * Directeur de recherche, CNRS, Paris School of Economics (PSE). Contact : luc.arrondel@psemail.eu.
Ronan MAHIEU ** Directeur des études et des statistiques, Direction des politiques sociales, Caisse des Dépôts (CDC).
Laurent SOULAT *** Chargé d'études économiques et financières, Direction des politiques sociales, CDC.Les auteurs remercient Sergio Perelman, Pierre Pestieau et Jérôme Schoenmaeckers pour leurs remarques. Cette recherche a bénéficié du soutien de l'axe « Économie publique et redistribution » du Cepremap. L'Institut Europlace de Finance (IEF) a également soutenu financièrement ce travail.Cet article a été présenté lors du colloque « Retraite et vieillissement » à la Caisse des Dépôts, le 19 octobre 2023.

Les gains importants d'espérance de vie aux âges élevés enregistrés au cours des décennies écoulées, conjugués avec l'arrivée au grand âge des générations du baby-boom, laissent anticiper une croissance rapide des coûts de prise en charge de la dépendance. Cette perspective alimente les débats sur le mode de financement souhaitable de la perte d'autonomie : en l'absence d'une couverture assurantielle suffisamment large et compte tenu de la difficulté à évaluer tant la probabilité de devenir un jour dépendant que les coûts associés, le risque est grand que les ménages anticipent mal leur effort d'épargne. Cet article s'inscrit dans cette problématique : en mobilisant les données de la vague 2020 de l'enquête Pat€r, nous cherchons à évaluer dans quelle mesure les ménages modulent effectivement leur effort d'épargne en fonction de leur estimation de la probabilité de perdre un jour leur autonomie de santé. À cet effet, nous estimons le patrimoine du ménage en fonction de l'auto-évaluation du risque de devenir un jour dépendant (toutes choses égales par ailleurs, notamment l'état déclaré de santé). De plus, une méthode de variable instrumentale permet de tenir compte de la possible endogénéité du risque anticipé de dépendance (on accumule moins si l'on est en mauvaise santé). Nos résultats montrent bien que plus on anticipe un risque de dépendance élevé, plus on accumule du patrimoine : calculé au risque de dépendance moyen, un écart type de probabilité en plus induit un patrimoine global supérieur de trois mois à huit mois de revenu permanent.

La perte d'autonomie au grand âge est un risque dont la probabilité d'occurrence est relativement élevée. L'intensité de l'incapacité et surtout sa durée sont toutefois très variables d'un individu à l'autre. Même si ces situations sont rares, certaines personnes vont donc connaître des épisodes de dépendance lourde pendant plusieurs années, lesquels vont générer des coûts de prise en charge qui excèdent souvent les ressources des ménages concernés et viennent alors ponctionner leur patrimoine.Dans quelle mesure les individus intègrent-ils ce risque dans leur stratégie patrimoniale ? En d'autres termes, le risque de devenir un jour dépendant les conduit-il à épargner davantage pour le jour venu être en mesure de faire face aux coûts de prise en charge de la perte d'autonomie sans solliciter leurs proches, ni réduire l'héritage qu'ils…