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 Les risques de liquidité bancaire : définitions, interactions et réglementation


Youssef AZZOUZI IDRISSI Doctorant, université de Grenoble et CERAG (Centre d’études et de recherches appliquées à la gestion), UMR 5820 CNRS et université Pierre Mendès France, Grenoble 2.
Philippe MADIÈS * Professeur de Finance, Université Grenoble Alpes, Grenoble INP, CERAG. Contacts : philippe.madies@univ-grenoble-alpes.fr et ollivier.taramasco@univ-grenoble-alpes.fr.
Ce papier montre le caractère polymorphe de la liquidité et, par voie de conséquence, du risque de liquidité en analysant trois types de liquidité et leurs risques associés, la liquidité banque centrale, la liquidité de marché et la liquidité de financement. Il met en évidence les interactions entre le risque de liquidité de marché et le risque de liquidité de financement, et montre comment ces deux types de risque se renforcent mutuellement. Ce cadre d’analyse permet d’évaluer les propositions de Bâle III en matière de contrôle du risque d’illiquidité dans les banques en mettant l’accent sur les deux nouveaux ratios de liquidité, le ratio de liquidité «  à court terme  », ou ratio LCR, et le ratio de liquidité «  à long terme  », ou NSFR. Les auteurs montrent leurs vertus mais aussi leurs limites et suggèrent quelques pistes négligées par le régulateur.

Les banques par leur métier socialement utile, qui consiste à transformer des ressources à court terme en crédits à moyen et long terme et donc à transformer des échéances, sont exposées au risque d’illiquidité. La crise bancaire profonde, qui a débuté à l’été 2007, l’a rappelé et a remis en cause la gestion des risques bancaires en général et le risque de liquidité en particulier, jusqu’ici négligé au profit d’autres risques comme le risque de crédit ou le risque de marché. Il est marquant d’observer que l’harmonisation internationale de la réglementation bancaire, au travers des accords de Bâle I (1988) ou de Bâle II (2004), a exclu de son champ d’application un tel risque de liquidité. Un exemple emblématique des dangers d’une telle situation est donné par la banque anglaise Northern Rock que le gouvernement britannique va même jusqu’à nationaliser en février 2008 faute de repreneur. Cette banque, qui respectait pourtant le ratio de solvabilité européen et international (Bâle II), a subi une crise d’illiquidité sans précédent. En deux jours, les 14 et 15 septembre 2007, elle a connu un phénomène de ruée bancaire : des déposants paniqués ont retiré 2 Md£, soit 10 % des dépôts.

Dans un environnement de marchés incomplets1et d’asymétrie d’information, deux types de chocs de liquidité menacent les banques : un choc idiosyncratique, qui touche individuellement une banque via des ruées bancaires autoréalisatrices (Diamond et Dybvig, 1983) ou fondées sur des informations sur l’état de santé de la banque, et un choc systémique plus dangereux, qui paralyse l’ensemble du système bancaire. Ces deux types de chocs ne sont pas indépendants et le premier peut notamment par contagion d’une banque à l’autre provoquer le second. En outre, l’accumulation de liquidité chez certaines banques (liquidity hoarding) peut catalyser la crise systémique en bloquant le fonctionnement du marché monétaire interbancaire, comme la crise bancaire récente a pu le démontrer. Cette accumulation de liquidité s’explique par un manque de confiance dans les autres banques ou la peur de ne pas être en mesure de faire face à ses propres besoins de liquidité dans le futur (Heider, Hoerova et Holthausen, 2009). Ce comportement mène naturellement à un gel des prêts entre banques sur le marché interbancaire, les privant par conséquent d’une source de liquidité importante.

Cet article met l’accent sur un autre facteur d’importance et insuffisamment analysé. Il s’agit des fortes interactions entre le risque de liquidité dit « de financement », c’est-à-dire la possibilité que, sur une période donnée, une banque soit incapable d’honorer ses engagements immédiats, et le risque de liquidité dit « de marché », c’est-à-dire le risque de ne plus pouvoir trouver la liquidité nécessaire sur les marchés. Nous montrerons comment ces deux risques se renforcent mutuellement (Brunnermeier et Pedersen, 2009).

Il se déroule en deux temps. Dans une première partie, nous revenons sur les définitions des différents types de liquidité et de leurs risques associés afin d’analyser ensuite, théoriquement et empiriquement, les interactions qui émergent entre ces risques, en particulier entre le risque de liquidité de financement et celui de liquidité de marché. Cela nous donne la possibilité dans une seconde partie d’étudier l’apport d’une réglementation portant sur le risque de liquidité, dans le cadre de Bâle III, et de formuler quelques propositions qui semblent avoir été négligées par le régulateur.

Liquidité de financement et liquidité de marché : concepts et interactions

On peut distinguer trois types de liquidité et donc trois risques correspondants : la liquidité banque centrale (central bank liquidity), la liquidité de marché (market liquidity) et la liquidité de financement (funding liquidity). Définissons ces liquidités et leurs risques inhérents avant de mettre en exergue la forte interaction entre le risque de liquidité de financement et le risque de liquidité de marché.

Risques de liquidité : définitions2

La liquidité banque centrale et celle de marché constituent des sources de liquidité pour les banques, c’est-à-dire une réserve dans laquelle elles peuvent puiser. Elles constituent donc une offre de liquidité pouvant alimenter la demande nette des banques, appelée « liquidité de financement ».

La liquidité banque centrale et le risque de liquidité banque centrale

La liquidité d’une banque centrale est sa capacité à fournir la liquidité dont le système financier a besoin. Le risque de liquidité inhérent dans ce cas est presque inexistant parce que la banque centrale peut toujours fournir de la monnaie banque centrale dont elle a le monopole d’émission. Le risque pour les banques de second rang de ne plus avoir accès à cette liquidité est quasi nul et la banque centrale joue un rôle de prêteur en dernier ressort, c’est-à-dire qu’elle détient le réservoir ultime de liquidité. Dans le cadre de sa politique monétaire, elle a le pouvoir de prêter la quantité de liquidité qu’elle souhaite au prix qu’elle détermine et veille à éviter les situations d’excès ou de déficits de liquidité dans le système.

Cette liquidité est importante car seule la banque centrale est en mesure d’augmenter la liquidité globale disponible pour les banques contrairement à la liquidité de marché présentée ci-dessous et qui correspond à un simple transfert de liquidité via les marchés d’actifs.

La liquidité de marché et le risque de liquidité de marché

La liquidité de marché correspond à la liquidité, ou la monnaie, qu’un investisseur, ici une banque, est en mesure d’obtenir grâce à la liquidation des actifs qu’il détient. Elle renvoie donc à la liquidité des actifs négociables sur un marché, c’est-à-dire à leur faculté d'être instantanément revendus et sans perte de valeur (à un prix de liquidation proche de leur prix d’achat).

Il s’agit clairement d’une conception keynésienne de la liquidité (Keynes, 1936). La liquidité d’un actif renvoie à la liquidité du marché (secondaire) où il se négocie, d’où la terminologie de liquidité de marché. Un marché liquide présente quatre caractéristiques : la profondeur, l’étroitesse, l’immédiateté et la résilience. La profondeur du marché est la capacité de réaliser des transactions de volume important sans impact significatif sur les prix. Plus le marché le permet et plus il sera profond. L’étroitesse du marché est l’écart entre les cours vendeur et acheteur (bid-ask spread). Plus cet écart est petit, plus les coûts de transaction sont faibles et le marché étroit. L’immédiateté du marché se réfère à la vitesse à laquelle les ordres y sont exécutés. La résilience du marché reflète enfin la rapidité avec laquelle les prix des actifs négociés reviennent à leur valeur fondamentale après un épisode de perturbation sur les marchés financiers.

Ces quatre caractéristiques d’un marché garantissent que n’importe quel montant d’actifs peut être vendu à n’importe quel moment sur le marché, sans moins-value et avec un impact minimal sur le prix de marché. En résumé, ces conditions garantissent qu’un actif soit facilement transformé en monnaie (cash).

Il existe deux types de liquidité de marché : (1) la liquidité obtenue sur le marché interbancaire, où la liquidité se prête seulement entre banques, et (2) la liquidité obtenue sur les marchés d’actifs, où les vendeurs d’actifs reçoivent de la liquidité, en contrepartie des actifs cédés, de la part des acheteurs. Ces deux types de liquidité de marché représentent pour les banques des sources importantes d’approvisionnement en liquidité de financement et expliquent de ce fait les interactions fortes qui existent entre la liquidité de financement et la liquidité de marché. Précisons toutefois que la liquidité de marché ne permet qu’un transfert de liquidité entre agents économiques, mais ne permet pas d’augmenter la quantité de liquidité disponible pour l’ensemble des banques. Seule la banque centrale est en mesure de le faire en augmentant la liquidité banque centrale.

Quant au risque de liquidité de marché, il va naturellement s’associer à l’incapacité d’effectuer immédiatement et à un prix raisonnable des transactions sur le marché.

La liquidité de financement et le risque de liquidité de financement

Drehmann et Nikolaou (2009) définissent la liquidité de financement chez les banques comme une situation de trésorerie où elles sont capables de faire face à leurs obligations à temps3. Par conséquent, une banque est illiquide si elle est victime d’une insuffisance de trésorerie, c’est-à-dire si elle n’est plus en mesure d’honorer ses engagements immédiats (décaissements) grâce à ses encaissements. En interne, la banque possède donc des réserves de liquidité que sont les encaissements liés à son activité qui peuvent correspondre, par exemple, à une augmentation de la collecte de dépôts. La liquidité de financement s’apparente donc à une demande nette de liquidité qui peut d’ailleurs correspondre, dans certains cas, à une offre nette de liquidité lorsque la trésorerie nette de la banque est positive (la banque prêtera alors sur le marché monétaire interbancaire). Ces auteurs considèrent donc que « le risque de liquidité de financement correspond à la possibilité que sur un horizon donné, la banque puisse devenir incapable de régler ses obligations d’une manière immédiate ». Ce risque présente deux composantes mesurant respectivement un effet « quantité » et un effet « prix » : le montant aléatoire des flux sortants de monnaie ou de trésorerie (décaissements) et le coût aléatoire d’obtention de la liquidité de financement de différentes sources (liquidité de marché, liquidité banque centrale, dépôts à vue)4. Le risque de liquidité dépend ainsi de la distribution de probabilités des deux composantes aléatoires citées ci-dessus.

Interactions entre la liquidité de financement et la liquidité de marché

Les différents concepts de liquidité ayant été définis, nous pouvons éclairer les interactions existant entre la liquidité de financement et la liquidité de marché grâce à deux approches théoriques et une approche empirique.

Approche de Nikolaou

Nikolaou (2009) met en évidence les liens qui existent entre les trois types de liquidité en se basant sur deux scénarios. Le premier est celui de périodes normales où le risque de liquidité est faible et où un cercle vertueux entre les trois types de liquidité est à l'œuvre. Le second correspond à des périodes de turbulences caractérisées par un risque de liquidité élevé et un cercle vicieux entre les trois types de liquidité.

Dans le premier scénario, la liquidité circule facilement entre les trois types de liquidité établissant un cercle de liquidité vertueux qui contribue à la stabilité du système financier (cf. schéma 1 infra). La banque centrale, qui a la responsabilité de fournir la liquidité agrégée (Friedman et Schwarz, 1963), apporterait la quantité de liquidité neutre au système financier, liquidité qui à son tour serait redistribuée par les marchés des agents en excès de liquidité (dits « surliquides ») vers ceux qui ont besoin de liquidité (dits « illiquides »). Après cette redistribution, la banque centrale observerait la nouvelle demande globale de liquidité et adapterait sa création monétaire pour y répondre. Ainsi, un cercle de liquidité vertueux redémarre, et ainsi de suite.

Chaque type de liquidité joue un rôle spécifique et complémentaire car chaque forme de liquidité dépend ainsi du bon fonctionnement des deux autres pour que le système puisse être liquide dans son ensemble. En situation de cercle vertueux, la liquidité circule facilement dans le système et les banques peuvent avoir recours à n’importe quelle option de liquidité disponible (banque centrale, déposants, marché des actifs, marché interbancaire) en se fondant seulement sur le prix de chacune d’entre elles si les marchés sont efficients. Dans ce scénario, le risque systémique est minimal au sein du système financier et la probabilité d’une crise (systémique) est donc faible. La stabilité du système financier est donc assurée.

Schéma 1 Les trois nœuds de liquidité du système financier
Source : Nikolaou (2009).

Dans le second scénario de période de crise, Nikolaou (2009) met en évidence le passage du cercle vertueux au cercle vicieux. La réalisation du risque de liquidité, c’est-à-dire la survenance d’une situation d’illiquidité, provient des défauts de coordination entre les déposants, les banques et les opérateurs de marché, qui alimentent et sont alimentés par les asymétries d’information et l’incomplétude des marchés.

Cet auteur montre bien comment les interactions entre les trois principaux types de liquidité peuvent être affectées par le risque de liquidité. En fait, les liens forts qui existent en période normale restent présents en périodes de turbulences, mais cette fois, ils servent plutôt de canaux de propagation de risque et déstabilisent le système financier. Il met l’accent sur deux canaux de transmission : le marché interbancaire et le marché des actifs.

Canal du marché interbancaire

Ce canal permet la propagation du risque de liquidité de financement idiosyncratique au risque de liquidité de marché systémique. Cela est dû au fait que sur le marché interbancaire, le risque de liquidité de financement est directement lié au risque de liquidité de marché. Les faillites bancaires individuelles peuvent conduire à un rétrécissement du bassin commun de liquidité dont les banques dépendent et propager ainsi le manque de liquidité à d’autres banques. Une telle situation d’illiquidité généralisée peut conduire à une contagion de faillites au sein du système bancaire et donc à une crise systémique. De tels mécanismes de propagation proviennent de l’interconnexion forte entre les banques qui caractérise le secteur bancaire. Une contagion des ruées de déposants transforme une ruée individuelle en panique bancaire, assèche les réserves internes de liquidité des banques et met celles-ci en situation d’illiquidité (de financement). En outre, une perte de confiance généralisée entre banques, provoquée par la crainte de faillite d’une contrepartie (asymétrie d’information due à l’opacité des banques), conduit à une paralysie du marché monétaire interbancaire et peut provoquer, sans intervention de la banque centrale, une situation d’illiquidité et de faillites généralisées. Ainsi, l’illiquidité individuelle peut mener à l’illiquidité de marché dans un contexte de marchés incomplets et d’asymétrie d’information (Aghion, Bolton et Dewatripont, 2000).

Canal du marché des actifs

Quand le canal de liquidité du marché interbancaire est sévèrement affaibli, le risque de liquidité peut se transporter vers le marché des actifs parce que les banques sont contraintes de s’y procurer de la liquidité, mais moyennant des ventes à « prix cassés ». Cela aurait un impact à la baisse sur les prix des actifs et provoquerait une situation d’illiquidité de marché. La propagation passe par l’actif des bilans des banques puisque ces dernières se retrouvent obligées de restructurer leurs portefeuilles en privilégiant les actifs les plus liquides et en liquidant les autres actifs de façon de plus en plus coûteuse. Dans une telle situation, le cash-in-the-market pricing5 devient déterminant dans la mesure où il peut provoquer une chute des prix d’actifs en dessous de leurs valeurs fondamentales.

Spirale entre liquidité de financement et liquidité de marché

La propagation du risque de liquidité de financement vers le risque de liquidité de marché ne se fait pas que dans un seul sens. Ces deux risques peuvent se renforcer mutuellement dans un système réglementé et appliquant le principe de la comptabilisation en valeur de marché (mark-to-market). En effet, les prix des actifs en dessous de leurs valeurs fondamentales se répercutent immédiatement sur la valeur du bilan des banques avec la comptabilisation en mark-to-market. Par conséquent, les banques se voient obligées de procéder à des restructurations urgentes de leur bilan et se retrouvent contraintes de vendre davantage d’actifs à des prix encore plus bas pour répondre aux exigences réglementaires (notamment en matière de solvabilité et de fonds propres). Elles se retrouvent confrontées à des spirales de liquidité baissières dangereuses.

Approche de Brunnermeier et Pedersen

Brunnermeier et Pedersen (2009) s’intéressent à ces interactions en mettant l’accent sur les opérateurs de marché ou traders. Ils fournissent un modèle qui lie la liquidité d’un actif de marché à la liquidité de financement des traders. Ils rappellent que ces derniers fournissent de la liquidité de marché et que leur capacité de le faire dépend de la facilité avec laquelle ils accèdent à la liquidité de financement, à savoir le capital et les exigences de marge. Inversement, le financement des traders dépend de la liquidité du marché des actifs. Cette relation fait que la liquidité de financement et la liquidité de marché peuvent se renforcer mutuellement et mener à des spirales de liquidité.

Le trading exige du capital. Quand un trader veut acheter un titre, il emprunte de la liquidité auprès d’une contrepartie et il peut alors utiliser lui-même le titre comme collatéral (garantie) auprès du prêteur, mais il ne peut pas emprunter le prix en entier. La différence entre le prix du titre et la valeur du collatéral est la marge qui aide le prêteur à limiter ses risques, car son niveau de garantie dépend du prix fluctuant du titre pris en collatéral. Le même principe s’applique pour les ventes à découvert. Les marges se financent donc grâce aux fonds propres (capital) du trader qui doivent être à tout moment supérieurs au total des marges sur toutes ses positions.

Ainsi, le financement des traders affecte et est affecté par la liquidité de marché de manière profonde. Quand la liquidité de financement est faible, les traders sont réticents à la prise de positions, surtout lorsqu’il s’agit de positions sur des titres avec des marges élevées. Cela conduit à une baisse de la liquidité de marché qui engendre une augmentation de la volatilité du prix des actifs. Inversement, une liquidité faible du marché augmente le risque de financement d’un trader, augmentant par conséquent les marges à autofinancer.

Les marges sont déstabilisatrices pour le système financier lorsqu’elles augmentent avec l’illiquidité de marché, et ce, dans un contexte où les traders sont imparfaitement informés quant à la valeur fondamentale des actifs et où la volatilité du marché est forte. Elles poussent dans ce cas les spéculateurs à liquider leurs positions dans les temps de crise. C’est ce qui contribue à rendre fragile le marché et à l’assécher en liquidité de manière soudaine.

Les marges peuvent aussi théoriquement diminuer avec l’illiquidité de marché et jouent alors un rôle stabilisateur. Cela arrive quand les opérateurs de marché sentent que les prix divergent des valeurs fondamentales à cause d’une illiquidité provisoire du marché et que la liquidité va s’améliorer. Cela est important car le prix des actifs est guidé par des considérations de liquidité de financement plutôt que par des mouvements dans leur valeur fondamentale pendant les crises. En effet, l’information sur la valeur fondamentale des actifs et la volatilité fondamentale des marchés est cruciale dans de telles circonstances car elle éclaire les agents financiers. Elle leur permet de distinguer un état d’illiquidité dû à la mauvaise qualité des actifs d’un état d’illiquidité passager dû à un défaut de coordination entre les acteurs du marché. L’information joue ici un rôle clé dans la rationalité du comportement des marchés puisqu’elle permet aux agents financiers de fixer correctement le niveau des marges.

De manière générale, Brunnermeier et Pedersen (2009) évoquent deux équilibres. Le premier se produit quand les marchés sont liquides avec des conditions de marge favorables et un accès facile au financement pour les spéculateurs qui aident à leur tour à améliorer cette liquidité à travers leurs activités. Le second se produit lorsque les marchés sont illiquides, avec des exigences de marge plus élevées, ce qui limite l’accès au financement des spéculateurs qui, à leur tour, fournissent moins de liquidité de marché. Ce renforcement mutuel de l’illiquidité de financement et de l’illiquidité de marché se traduit par des spirales de liquidité qui peuvent être des spirales de marge ou de perte. Une spirale de marge arrive quand une diminution dans le financement contraint un trader à fournir moins de liquidité de marché. Si les marges augmentent avec l’illiquidité de marché, la baisse initiale dans le financement accentue la contrainte de financement des opérateurs de marché, ce qui les conduit à diminuer leur trading, et ainsi de suite. Ici, le phénomène de fuite vers la qualité (flight-to-quality) apparaît fréquemment parce que lorsqu’il y a un choc de liquidité, les spéculateurs réduisent la fourniture de liquidité de marché et particulièrement celle qui consomme beaucoup en capitaux (concernant les actifs avec des marges hautes).

Quant à la spirale de perte, elle arrive quand un trader détenant un titre fait face à un problème de financement et essaie de vendre le titre, même à « prix cassés ». Il réduit alors la liquidité de marché et encourt des pertes, ce qui renforce le problème initial, et ainsi de suite.

Schéma 2 Les étapes des spirales de marge et de perte
Source : Brunnermeier et Pedersen (2009).
Validation empirique des interactions entre la liquidité de financement et la liquidité de marché

Alors que, comme nous venons de le voir, des approches théoriques ont été développées sur ces interactions et que nombre d’observateurs attribuent la crise de liquidité récente à ces interactions, les validations empiriques se font rares sur le sujet en raison des difficultés à mesurer le risque de liquidité de financement. L’une des rares études est celle de Drehmann et Nikolaou (2009) qui construisent un proxy, nommé LRP (liquidity risk proxy), mesurant le risque de liquidité de financement. Pour cela, ils se sont basés sur les appels d’offres (auctions) hebdomadaires de la BCE (Banque centrale européenne) dans le cadre de ses opérations principales de refinancement.

Principes de la mesure

Drehmann et Nikolaou (2009) partent du modèle de Nyborg et Strebulaev (2004) à partir duquel ils montrent formellement qu’étant donné les imperfections du marché interbancaire (asymétries d’information) particulièrement prégnantes en situation de crise, les short banks (celles qui ont besoin d’emprunter la monnaie auprès de la banque centrale ou sur le marché interbancaire pour faire face à leurs engagements) soumettent des offres plus « agressives » que les long banks (celles qui disposent de liquidités excédentaires) lors des appels d’offres de la banque centrale. En effet, les short banks veulent éviter de payer des taux d’intérêt trop élevés sur le marché interbancaire en se retrouvant en situation de faiblesse face aux long banks, qui ont un pouvoir de marché élevé notamment en situation de pénurie de liquidités. Les long banks exigent des taux d’intérêt plus élevés ou, pire encore, peuvent s’accaparer des actifs des short banks obtenus à des prix de vente « sacrifiés », comme dans le modèle d’Acharya, Gromb et Yorulmazer, (2008).

Comme les short banks anticipent cela en soumettant leurs offres, elles savent qu’elles peuvent éviter de tomber dans une telle situation si elles obtiennent des fonds suffisants de la banque centrale lors des opérations d’open market. De ce fait, les offres soumises par les banques contiennent de l’information sur leur besoin en liquidité de financement et donc sur leur risque de liquidité de financement.

De plus, Nyborg et Strebulaev (2004) montrent que non seulement à l’équilibre la menace d’une pression incite les short banks à soumettre des offres au-dessus du taux directeur affiché par la banque centrale avec un taux moyen plus élevé que celui des offres soumises par les long banks, mais aussi que cet écart de prix (spread) est d’autant plus grand que la position des banques est courte. Pour résumé, lorsque la demande de liquidité (nette des réserves internes) d’une banque est élevéeet que le risque de liquidité de financement est lui-même à un niveau important, la banque concernée propose un taux d’intérêt haut et le spread lors de l’appel d’offres de la banque centrale est élevé.

L’indicateur retenu

Pour construire ce proxy qui mesure le risque de liquidité de financement, Drehmann et Nikolaou (2009) se basent sur les données des opérations d’open market. Ils utilisent les données, difficiles à obtenir, concernant 135 opérations principales de refinancement conduites par la BCE entre juin 2005 et décembre 2007. Le proxy proposé prend en compte des informations sur le prix de la liquidité (le taux d’offre soumis par une banque moins le taux directeur de la BCE – taux REFI) et sur le volume de liquidités obtenu et donc alloué par la BCE. Cela est ramené au volume total de liquidités fournit par la BCE afin de neutraliser les changements de politique monétaire et d’assurer une cohérence, sachant que les enchères (auctions) ou appels d’offres peuvent être de tailles différentes. Ces auteurs calculent ainsi les offres ajustées ou adjusted bids (AB) de chaque banque i à l’enchère t pour les offres acceptées (successful bids) :

Ils construisent alors le proxy agrégé LRP pour le risque de liquidité de financement qui n’est rien d’autre que la somme de toutes les offres individuelles ajustées des banques pour chaque appel d’offres :

b (de b = 1 à B) sont les offres de chaque banque i (de i = 1 à N) pour chaque enchère ou appel d’offres t.

Les résultats

En analysant ces données, Drehmann et Nikolaou (2009) trouvent que le risque de liquidité de financement a des propriétés semblables au risque de liquidité de marché, à savoir des niveaux faibles avec des pointes occasionnelles observées après le début de la crise des subprimes en août 2007. Par ailleurs, ils utilisent le proxy LRP pour examiner empiriquement la liaison entre la liquidité de financement et la liquidité de marché. Pour cela, ils régressent un indice de liquidité de marché sur un indicateur de liquidité de financement (proxy LRP) via un modèle de régression linéaire simple (cf. tableau 1 infra). Ils trouvent qu’une relation clairement négative émerge lors de la période de crise, c’est-à-dire que quand la liquidité de financement baisse, le risque de liquidité de marché est haut (ce qui est équivalant à ce qu’un haut risque de liquidité de financement est associé à un haut risque de liquidité de marché).

Tableau 1 Résultats de la régression de l’indice de liquidité de marché sur LRP
* Échantillon normal : période allant de juin 2005 à août 2007.** Échantillon de crise : période allant d’août 2007 à décembre 2007.
Source : Drehmann et Nikolaou (2009).

Ce résultat empirique confirme ce que les modèles de Nikolaou (2009) et de Brunnermeier et Pedersen (2009) suggèrent, à savoir que la liquidité de marché et la liquidité de financement se renforcent mutuellement.

Le traitement du risque de liquidité dans Bâle III

Les accords de Bâle I (1988) et Bâle II (2004) n’ont pas harmonisé internationalement la réglementation du risque de liquidité, réglementation qui existe depuis longtemps dans certains pays comme la France (1946). Les accords de Bâle III se sont saisis de cette question et ont intégré le risque de liquidité à côté des risques de crédit, de marché et opérationnels. Le cadre d’analyse proposé dans la première partie nous permettra de voir que Bâle III se focalise sur la liquidité de financement en imposant des ratios internes de liquidité à respecter, ce qui néglige les interactions avec le risque de liquidité de marché dont nous avons montré l’importance. Nous présenterons ainsi dans un premier temps les ratios de liquidité proposés par Bâle III pour en proposer ensuite une évaluation qui nous conduira à formuler des propositions.

Les nouveaux ratios de liquidité LCR et NSFR

Le nouveau cadre réglementaire pour la surveillance de la liquidité développé par le Comité de Bâle (Bâle III) en réponse à la crise financière récente vise à fortifier la résistance des banques face à l’émergence des chocs de liquidité. Afin d’atteindre cet objectif, il propose d’introduire deux ratios qui s’appliqueront progressivement, et ce, pour l’ensemble des pays du G20 : le liquidity coverage ratio (LCR) et le net stable funding ratio (NSFR)6.

Le ratio de liquidité à court terme LCR

Le LCR est un ratio de liquidité à un mois dont l’objectif est de permettre aux banques de résister à des crises de liquidité idiosyncratiques et systémiques sur un horizon d’un mois. Ce ratio fait l’objet d’une période d’observation depuis 2011 dans la perspective de l’introduire en tant que norme à partir de 2015.

Sur une période de trente jours, il permet de s’assurer que les banques détiennent suffisamment d’actifs très liquides dans leur bilan pour leur permettre de faire face à une ruée sur les dépôts ou à une baisse importante de trésorerie :

avec flux nets à 30 jours = flux décaissés – min (flux encaissés ; 75 % flux décaissés).

Des précisions sur le numérateur s’imposent puisque certains de ses paramètres font l’objet de réflexions ultérieures dans notre article (cf. tableau 2 infra). La réserve d’actifs liquides est composée de réserves de disponibilités (cash) et d’actifs liquides valorisés en situation de stress. Cette réserve contient un stock d’actifs très liquides composé d’obligations souveraines, de titres émis par des banques centrales ou des organismes publics sans risque, ainsi que de certaines obligations corporate ayant une note supérieure ou égale à AA–.

Notons que les actifs de niveau 2 ne doivent pas dépasser 40 % de la réserve de liquidité et que les titres arrivant à maturité dans le mois ne sont pas pris en compte dans la réserve de liquidité puisqu’ils sont comptabilisés dans les flux encaissés au dénominateur. Au dénominateur, le régulateur a veillé à ce que les flux encaissés soient plafonnés à hauteur de 75 % des flux décaissés pour s’assurer que même les banques avec des encaissements particulièrement élevés se constituent une réserve de liquidité. Par conséquent, pour obtenir un LCR supérieur à 100 %, la réserve d’actifs liquides doit être supérieure aux flux nets à trente jours. Ce qui implique que dans le cas le plus favorable, elle doit être supérieure à 25 % des décaissements.

Tableau 2 Calcul du numérateur du LCR (en %)
Source : Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (2010).
Le ratio de liquidité à long terme NSFR

Le dispositif de Bâle III prend aussi en compte le risque de liquidité à long terme. Le NSFR compare les ressources financières stables dont disposent les banques avec leurs besoins de financement stables, y compris les éléments hors-bilan. L’objectif affiché est de limiter le recours excessif à la transformation de maturités en encourageant les banques à recourir à des financements de plus long terme. Ce ratio fait l’objet d’une période d’observation à partir de 2012, dans la perspective de l’introduire à partir de 2018. Le principe du NSFR est le suivant : le montant de financement stable disponible doit être supérieur au montant de financement stable exigé :

Bâle III est-il sur la bonne voie ?

Avec la nouvelle réglementation Bâle III, le régulateur élimine certes une partie du risque de liquidité chez les banques, mais les solutions proposées sont problématiques dans le contexte actuel, voire une source potentielle de nouveaux problèmes à l’avenir.

Tout d’abord, il est à noter que le ratio LCR vise à réduire le risque de liquidité de financement sans vraiment tenir compte des interactions avec le risque de liquidité de marché. En fait, ce ratio est le rapport entre la liquidité de marché (qui est, rappelons-le, une réserve externe de liquidité) et la liquidité de financement, qui retrace un besoin de financement à très court terme des banques. Certes, le régulateur contraint les banques à détenir des actifs très liquides et évite, dans une certaine mesure, la liquidation à « prix cassés  » d’actifs pour faire face à une crise d’illiquidité ou à des phénomènes de fuite «  vers la qualité », c’est-à-dire, dans ces situations, vers la liquidité. Mais le ratio ne peut limiter que partiellement le renforcement mutuel du risque de liquidité de marché et du risque de liquidité de financement car en situation de crise d’illiquidité, les banques qui normalement ont toutes réglementairement constitué ces réserves d’actifs très liquides doivent les liquider en même temps, faisant brutalement chuter leur prix et donc leur contre-valeur en monnaie. Cela étant, le régulateur, à juste titre, s’est bien gardé d’introduire au numérateur le vivier de titres éligibles pouvant servir de garantie à un emprunt de liquidité sur le marché monétaire interbancaire ou auprès de la banque centrale. On sait que la réserve de liquidité banque centrale est quasi illimitée et il faut avant tout veiller à ce que les banques soient en mesure de trouver la liquidité sur le marché pour éviter des comportements d’aléa de moralité de leur part.

Ensuite, il est clair que la composition du ratio LCR, mesure phare de Bâle III dans la prévention du risque de liquidité des banques, donne une place très importante aux obligations émises par les États dans les actifs considérés comme étant sans risque. Nous pouvons craindre que pour respecter ce nouveau ratio, les banques prêtent moins aux entreprises pour compenser leur détention d’obligations souveraines. Cela signifie que les banques seraient plus incitées à financer les États que l’économie. Cependant, la crise récente des dettes souveraines dans la zone euro a démontré que l’idée selon laquelle le défaut d’un emprunteur souverain de la zone euro est impossible ne tient plus. Cela conduira les banques elles-mêmes à être plus discriminantes en matière d’obligations d’État pour constituer leur réserve d’actifs liquides, certaines de ces obligations étant passées du niveau 1 au niveau 2, les plus risquées en étant exclues (cf. tableau 2 supra).

Par ailleurs, beaucoup de spécialistes voient d’un mauvais œil la mise en place du ratio NSFR qui remettrait en cause le métier même de la banque, à savoir la transformation des ressources à court terme en crédits à moyen et long terme, puisque ce ratio a pour objectif de contraindre les banques à utiliser des ressources stables à plus d’un an pour financer une partie considérable de leurs actifs longs, et ce, en situation de stress sur un horizon d’un an. On sait que l’une des spécificités des banques au sein des systèmes financiers, qui explique leur raison d'être, réside dans cette activité de transformation d’échéance qui ne peut avoir lieu sur les marchés financiers. Certes, cette activité ne disparaît pas, mais elle est réduite afin d’accroître la stabilité du secteur bancaire. La mise en place du NSFR pourrait donc aboutir à une augmentation des taux de crédit si les banques voulaient maintenir des marges suffisantes et, par voie de conséquence, à un ralentissement des crédits bancaires accordés à l’économie.

Propositions pour Bâle III

Dans leur approche pour gérer le risque de liquidité, les accords de Bâle III ont négligé les dysfonctionnements, les anomalies, voire les irrationalités des marchés. Cette négligence, ajoutée à la généralisation des normes comptables IFRS (International Financial Reporting Standards) et notamment la valeur de marché (mark-to-market), n’aidera pas à prévenir et traiter les crises d’illiquidité au sein du système financier.

Il serait alors judicieux que les régulateurs bancaires utilisent leur influence pour limiter tout d’abord la comptabilisation en valeur de marché qui répercute de façon immédiate les variations des prix des actifs. Ensuite, ils devraient chercher à corriger, et cela est parfois flagrant, les comportements déviants (voire irrationnels) au sein des marchés financiers qui conduisent à ce que les prix des actifs s’écartent de leur valeur fondamentale de façon durable. En effet, nous avons analysé de manière détaillée les interactions entre le risque de liquidité de financement et le risque de liquidité de marché et les spirales de liquidité baissière qui peuvent en résulter, surtout dans un contexte d’utilisation du mark-to-market et du cash-in-the-market pricing, qui ensemble accélèrent la déstabilisation du système financier.

À ce sujet, les instances de régulation et les banques centrales ont un véritable rôle à jouer en termes de production et de diffusion d’information. En effet, elles doivent se doter des moyens nécessaires pour suivre la structure des portefeuilles des investisseurs, l’évolution des prix d’actifs et la liquidité sur les marchés au niveau international. Ainsi, elles devraient diffuser des indicateurs construits avec la profession bancaire et financière permettant de détecter et de mesurer les anomalies, notamment de pointer des classes d’actifs dont le prix n’est plus en adéquation avec le couple rendement/risque, car les investisseurs sont en pleine fuite vers la « qualité-liquidité ». La diffusion de telles informations auprès des investisseurs et des banques permettraient de limiter les comportements moutonniers et autoréalisateurs. Il suffit que les questions de liquidité prédominent pour que les investisseurs anticipent que les autres opérateurs vont se désintéresser d’un actif ou d’une classe d’actifs jugés peu liquides. Ils anticipent donc que le marché sera majoritairement vendeur et que les prix baisseront et proposent donc eux-mêmes ces actifs à la vente. Il s’ensuit une baisse effective de la liquidité de marché et un effondrement des prix, ce qui revient à ce que les investisseurs avaient anticipé au départ (prophétie autoréalisatrice).

La liquidité constitue un phénomène polymorphe et il existe différents types de liquidité et donc de risques associés. Nous avons pu mettre en évidence, au travers d’approches théoriques et empiriques, la relation forte et à double sens entre le risque de liquidité de financement et le risque de liquidité de marché. Nous avons ensuite analysé la prise en compte du risque de liquidité dans les accords de Bâle III au travers des nouveaux ratios LCR et NSFR. Certes, cette prise en compte constitue une avancée, mais le ratio LCR aura du mal, comme nous l’avons prouvé, à casser le lien fort entre le risque de liquidité de financement et le risque de liquidité de marché, même s’il l’amoindrit. En outre, ce ratio donne une grande place à la détention d’obligations souveraines considérées par le régulateur comme étant sans risque, alors que la crise des dettes dans la zone euro a récemment prouvé le contraire. De plus, sa composition pourrait affecter négativement le niveau des prêts bancaires à l’économie en faveur du financement de la dette des États. Concernant le ratio NSFR, il prouve que la recherche de la stabilité financière a un coût économique en limitant l’activité de transformation des banques nécessaire au financement de l’économie et qui ne peut être réalisée au sein des marchés de capitaux. Enfin, il nous semble que les régulateurs pourraient jouer un rôle complémentaire aux agences de notation dans la production et la diffusion d’information sur des actifs ou classes d’actifs dont le prix s’éloigne de leur valeur fondamentale pour des raisons de fuite vers la liquidité. Ils devraient en outre agir pour que la comptabilisation en mark-to-market soit repensée pour les banques.


Notes

1 Un marché (financier) incomplet est un marché où les contrats qui se nouent entre les opérateurs ne peuvent prévoir, étant donné l’incertitude, toutes les possibilités et y affecter une probabilité objective.
2 Le risque de liquidité est en fait un risque d’illiquidité. La liquidité constitue une variable aléatoire binaire, ou de Bernoulli, qui comprend deux états avec une probabilité donnée : l’état de liquidité et l’état d’illiquidité. Le risque de liquidité correspondrait à la probabilité de survenance de l’état d’illiquidité.
3 Borio (2000), Strahan (2008) et Brunnermeier et Pedersen (2009) définissent la liquidité de financement comme la capacité à obtenir du cash à court terme soit par la vente d’actifs, soit par un nouvel emprunt. Ils lient donc intrinsèquement la liquidité de financement à la liquidité de marché.
4 Le caractère aléatoire du coût d’obtention de la liquidité provient essentiellement de la liquidité de marché, le taux auquel la banque centrale prête de la monnaie étant connu d’avance ainsi que le niveau de rémunération des dépôts à vue.
5 Le cash-in-the-market pricing est une méthode d’évaluation des actifs qui se base sur l’état de la liquidité de marché plutôt que sur le couple rentabilité/risque.
6 Pour le calcul détaillé des ratios LCR et NSFR, voir : Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (2010).

Bibliographies

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