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Bercy et les assureurs sont proches d’un accord sur la «flat tax»

07/09/2017 AGEFI Visiter le site source

Le gouvernement serait ouvert à la proposition des assureurs de ne pas appliquer la flat tax aux contrats d’assurance vie anciens et diversifiés.

Après leur avoir donné des sueurs froides, la flat tax pourrait offrir une opportunité en or aux assureurs. Selon plusieurs sources proches du dossier, ces derniers seraient proches d’un accord avec le gouvernement pour préserver la fiscalité avantageuse de l’assurance vie.

Bercy souhaitait initialement appliquer le prélèvement forfaitaire unique de 30% (PFU, surnommé flat tax) à tous les nouveaux versements (faits à partir du 1er janvier 2018) des épargnants ayant plus de 150.000 euros placés en assurance vie. Pour les rachats intervenant après plus de huit ans, la fiscalité s'alourdirait de 5,3 points de pourcentage par rapport au régime du prélèvement forfaitaire libératoire (PLF). En effet, sans compter la flat tax, les prélèvements fiscaux et sociaux passeront de toute façon de 23% à 24,7% avec la hausse de la CSG. A noter qu’après huit ans, les revenus tirés du contrat ne sont taxés qu’au-delà d’un certain seuil, grâce à un abattement fixé à 4.600 euros pour un célibataire et 9.200 euros pour un couple.

De sources proches du dossier, l’administration serait prête à accepter la demande des assureurs de ne pas appliquer le PFU aux contrats de plus de douze ans pour les versements investis à plus de 30% en unités de compte (UC éligibles au PEA, investies à 75% minimum en actions françaises ou européennes). «Nous avons proposé de renforcer l’exigence de duration et de diversification pour les versements supérieurs à 150.000 euros, a expliqué hier Jacques de Peretti, PDG d’Axa France, lors d’un point presse. Une bonne partie de nos interlocuteurs nous a compris et est très sensible à cela.» En échange, le ministère de l’Economie souhaiterait des contreparties (comme la réduction des abattements), actuellement en négociation. L'article de projet de loi pourrait être bouclé dans les prochains jours pour un passage devant le conseil d’Etat mi-septembre et une présentation le 27 septembre avec l’annonce du budget 2018.

Comment les assureurs ont-ils fait valoir leurs arguments ? D’abord, en insistant sur le volume d’encours concernés. Bercy maintenait l’ambiguïté, affirmant sur son compte Twitter : «97% des contrats d’assurance vie ne seront PAS concernés par la réforme de la fiscalité ! #désintox». Et la Fédération française de l’assurance (FFA) de rétorquer : «On taxe les personnes pas les contrats.»

Un vrai danger sur les fonds en euros

Les contrats de plus de 150.000 euros représentent 3% des contrats, et 40% des encours, mais les épargnants ayant en tout plus de 150.000 euros en assurance vie «représentent probablement 10% de l’ensemble des détenteurs, et 50% à 60% des encours», a estimé Jacques de Peretti. Le stock d’assurance vie était de 1.656 milliards d’euros au 30 juin, dont environ 300 milliards d’euros investis en actions.

Les compagnies ont donc mis en garde contre les risques. «Il y a un vrai danger sur les fonds en euros, souligne Eric Le Baron, directeur général de SwissLife assurance et patrimoine. Si demain les épargnants n’ont plus d’effet incitatif sur la durée, ils vont arbitrer leurs fonds euros d'un établissement à l'autre ou vers des fonds obligataires plus rémunérateurs en cas de remontée des taux. […] Nous enregistrons un taux de rachat de 4 à 5% par an sur le secteur en général. Il pourrait passer de 10 à 20% par an. […] Les assureurs vont investir sur des durées beaucoup plus courtes». La FFA craint ainsi qu’une «quinzaine de milliards d’euros ne soit déviée, au cours des cinq prochaines années, vers le livret A ou d’autres liquidités».

Avec leur proposition, les assureurs vantent au contraire de mieux financer l’économie. «En cinq ans nous pouvons orienter 100 milliards d’euros de plus vers les actions, soit faire ce que le plan d'épargne en actions (PEA) est parvenu péniblement à faire en vingt-cinq ans», a insisté Jacques de Peretti.

L’issue serait idéale pour la profession. L’âge moyen des contrats est de onze ans. Les vieux contrats sont détenus surtout par des retraités, qui prennent peu de risques. La mesure permet «de forcer ces anciens contrats à aller vers les UC», observe Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne. Or, comme le rappelle Cyrille Chartier Kastler, président de Facts & Figures, «les marges des assureurs sont beaucoup plus conséquentes sur les unités de compte, peu consommatrices en capital, que sur les fonds euros».

«Tous les gouvernements ont voulu toucher à l’assurance vie, et quand ils ont pris conscience qu’ils allaient toucher à 1.600 milliards d’euros d’encours, ils ont toujours fait marche arrière», souffle un dirigeant d’assurance.