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La recherche bousculée par MiFID II

04/05/2017 AMGroup Visiter le site source

Par Patrick POIVRE
Directeur Associé
amGroup

Paris, 4 mai 2017

Nous saluions, il y a exactement un an, l’initiative de l’Agefi, avec le soutien d’ITG et d’AlphaValue, pour avoir permis aux gérants d’actifs, aux investisseurs institutionnels et aux corporates de prendre la mesure de l’impact de certaines mesures MiFID II sur leur modèle d’affaire. Pour mémoire, comme on le rappelait l’an dernier, l’Europe a décidé de demander aux entreprises d’investissement de distinguer et de facturer séparément les services de recherche et d’exécution, histoire que la fourniture de recherche en investissement ne tombe pas dans le champ des rétrocessions et que ladite entreprise soit à même de communiquer à ses clients, entre autres informations, le budget prévu pour cette recherche.

Le 27 avril dernier prenait place à Paris un séminaire intitulé « MiFID II : The New Research Requirements », l’initiative en revenant cette fois-ci à l’AFME (Association for Financial Markets in Europe) et à l’AFG, l’accueil au cabinet d’avocats Allen & Overy. Ce séminaire s’adressant clairement aux responsables juridiques, RCCI et autres Compliant Officers, l’objectif des organisateurs était de faire un véritable point d’étape sur le sujet. Brice Henry, Partenaire chez Allen & Overy, Eric Pagniez pour l’AFG et Tanguy de Werve pour l’AFME se sont partagé les introductions. Ensuite, après le rappel par Guillaume Eliet, Secrétaire Général Adjoint de l’AMF, de la vision du régulateur, ont été évoqués tour à tour et de manière très opérationnelle le point de vue de la Commission Européenne (truculent Tilman Lueder, patron à la Commission Européenne de l’équipe qui travaille sur ces sujets), l’application de la réglementation, sous la forme d’une table ronde menée par Bernard Coupez (Membre du Collège de l’AMF) et le futur de la recherche après l’application de MiFID II grâce à un panel animé par Andrew Brooke (Directeur de l’AFME). Et c’est à Muriel Faure pour l’AFG et Julian Allen-Ellis pour l’AFME qu’il appartenait de conclure.

Première observation évidente : la situation n’est pas la même selon que vous êtes un acteur de taille importante (merci pour les témoignages d’UBS, de Crédit Suisse, de Bank of America Merryl Lynch dont l’équipe qui suit ces sujets est forte d’une cinquantaine de personnes, d’Exane BNP Paribas et de Groupama AM) ou que vous êtes une société de gestion entrepreneuriale (merci à Antoine Dadvisard, CEO de Matignon Finances). Dans ce sens, des discussions sont d’ailleurs toujours en cours entre les autorités de tutelles et les représentants des SGE quant à l’application de certaines contraintes de la réglementation (faudra-t-il vraiment consulter chacun de ses clients ?!?). Clairement, les SGE n’ont pas les moyens d’appliquer cette réglementation, il faudra nécessairement qu’elles mutualisent son coût et se battent pour obtenir que la règle de proportionnalité s’applique également en ces matières.

En parlant de coût, la tendance majeure aujourd’hui semble être à la prise en charge par les acteurs des coûts de la recherche (voir sa ré-internalisation) plutôt que de basculer dans la création des comptes de recherche séparés, nécessitant l’établissement et l’acceptation client par client d’un budget de recherche. Et pour cause, il y a beaucoup d’interrogations quant à l’impact sur les coûts de ces contraintes, notamment en matière de CRM et de reporting spécifiques. Il faut savoir qu’à ce jour un tiers des acteurs ne savent pas encore quel dispositif ils retiendront et 50% ne savent pas s’ils vont externaliser cette recherche, en fait.

Autre enjeu majeur de l’application de cette réglementation : l’international. Sans rentrer dans le détail, comment faire avec les places qui ne sont pas éligibles à MiFID, par exemple ? Ou comment régler tous les possibles que la facturation de la recherche génère dès lors qu’acteurs, clients, brokers, etc. ne sont pas dans le même pays ?

Mais transcendant tous ces sujets, la question se pose toujours de savoir quelle est la valeur d’une recherche et cela ne semble pas simplement relever d’une posture rebelle : l’exemple d’une étude macro par trop générique et, c’est là où le bât blesse, trop accessible, est emblématique. Plus globalement encore, c’est le pricing de la recherche qui est toujours posé, en particulier pour le fixed income.

Par ailleurs, il y a consensus entre tous les témoins : il y aura de l’embouteillage dans l’air à la fin de l’année ! Les établissements seront prêts vis-à-vis de leurs clients importants, cela semble certain, mais ce sera moins vrai pour les autres catégories de clientèle et le retour de l’été sera intéressant à analyser. Comme le disait une intervenante, « l’impact sur les équipes juridiques sera de toute façon… monstrueux ! ».

Pour reprendre l’aveu-même de Tilman Lueder, voilà ce qu’il arrive lorsqu’en matière de réglementation, on ne réalise pas d’études d’impact…

Enfin, retrouvez la conclusion au séminaire qu'a réservé Muriel Faure, Membre du Collège de l'AMF et Présidente de la Commission Recherche et Innovation de l'AFG, par laquelle elle souligne en particulier un double aspect important induit par MiFID II sur la recherche : la nécessité de formation des acteurs et l'accès impératif à de nouveaux outils.